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47 – JEANNE OU ANNE DE SAVOIE (1305 ou 1306-1359)

47 - JEANNE OU ANNE DE SAVOIE (1305 ou 1306-1359)

impératrice de Byzance

Les dangers de l’Orient

Elle est la fille d’Amédée V (XV° comte 1249-1323) et de sa seconde femme Marie de Brabant (39), or son père meurt en 1323 (en préparant à Avignon avec le pape une croisade pour aider le basileus Andronic II contre les Turcs). Sa mère étant retournée vivre en Flandre, elle se retrouve presque orpheline avec son frère Edouard (1322-1395) et sa sœur Béatrice (42) au Bourget et à Evian auprès de leur tante la vertueuse et vigoureuse Marguerite (de Kibourg. 26).

Or en 1325 arrivent les ambassadeurs de Constantinople qui veulent marier le jeune prince héritier Andronic III Paléologue (1296-1341), veuf d’ Adélaïde de Brunswick (rebaptisée Irène). Son frère Edouard très flatté de la demande de Byzance avait de ce fait repoussé les autres prétendants mais surtout exigé qu’elle conservât sa foi catholique, ce qui ne semble pas avoir été possible (cf l’historien Dielh). La décision du mariage est prise le 22 septembre, et aussitôt elle part avec une brillante suite dont ses frères qui l’accompagnent jusqu’à Rivoli, où elle rencontre d’ailleurs Philippe de Savoie-Achaïe et la marquise de Montferrat (50). Le 18 octobre, on s’embarque à Savone pour n’arriver à Byzance qu’en février suivant. De toutes les façons, on prend son temps puisque ce n’est qu’en octobre qu’elle est mariée puis couronnée à Sainte-Sophie par le patriarche Isaïe (elle reçoit alors le prénom d’Anna, mais les chevaliers italiens en criant « Savoie » lors de la cérémonie irritent grandement une cour déjà fort inquiète de l’arrivée bruyante de cette étrangère.

Au delà des solennités apparentes, la situation de l’empire grec (restauré vaille que vaille en 1261) n’était guère brillante. Depuis 1325 Andronic partage le trône impérial avec son grand-père Andronic II avant de rompre avec lui et de devenir seul souverain en 1328. Bien incapable de pouvoir résister à ses voisins (bulgares, serbes, turcs), à sa famille, à ses concurrents (en particulier le ministre Cantacuzène), Andronic que les uns jugent « fringuant » et les autres brutal, passionné de chasse et de joutes équestres (introduites ici soi-disant par les Savoyards) est autant un mauvais mari qu’un mauvais père pour ses cinq enfants. Il meurt en 1341 ne laissant qu’un héritier (Jean V) en bas âge et une épouse tout aussi faible en dépit de l’aide toute théorique de Venise, Naples, Rhodes, Chypre, la France et bien sûr de la Savoie. Anne va surtout souffrir néanmoins de la question religieuse car les « Grecs »ne vont cesser de dénoncer le « clan savoyard » qui l’entoure et l’influence des papes qui la font, soi-disant, chanter en lui promettant leur aide en échange de la soumission des « schismatiques ».

Pour se faire des alliés, Anne affolée s’adresse au roi des Serbes, aux Génois et même aux Turcs, proposant des trésors qui n’existent plus et des mariages sans espoir. Enfin en 1347, acculée dans son palais, elle doit céder à toutes les exigences et ambitions du ministre Jean Cantacuzène champion de l’orthodoxie (en particulier pour marier sa fille avec le nouveau et jeune empereur Jean V). La guerre civile va durer jusqu’en 1355 quand les Paléologue reprennent le pouvoir mais écartée définitivement du trône, Anne se retire à Thessalonique avant de retourner en Italie où elle se passionne pour le culte de Saint François d’Assise, elle va jusqu’à Avignon pour préparer (vainement) une nouvelle croisade. Battue mais non désespérée, elle revient passagèrement à Constantinople et enfin à Thessalonique où elle meurt en 1365, juste avant l’essai (vain) de la croisade de son neveu Amédée VI (1343-1383) XVIII° comte de Savoie pour restaurer les Paléologues.

Décidément Anne n’avait pas eu de chance, incapable d’enrayer le déclin irrémédiable de l’empire, elle n’avait su ni pu trouver les soutiens nécessaires. De toutes les façons, notre savoyarde n’aurait pu jouer qu’un rôle intermédiaire, encore eut-elle fallu qu’elle rencontrât des circonstances et des moyens favorables …

Elle a été critiquée par toute une école historique (ainsi le chroniqueur Gregora) comme jalouse, violente, peu intelligente, adonnée à la magie et à l’astrologie, cependant l’Eglise Grecque a reconnu sa sainteté (en particulier pour sa piété dans les dernières années de sa vie).


  • MURATORE D. : Una principessa sabauda sul trono di Bisanzio. Giovanna di Savoia, imperatrice Anna Paleologina. Mémoires de l’Académie de Savoie. 1906. 2° série. tome XI.
  • BERTELE T. : Monete e sigilli di Anna di Savoia, imperatrice di Bisanzio.Rome. 1937
  • ORIGONE S. .Donne d’Oriente e d’Occidente. Milan. 1999