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Les rois de Sardaigne (1713-1861) 135 -157 (définitif)

3.D. LES REINES DE SARDAIGNE

LA FAMILLE ROYALE DE SARDAIGNE

135 - ANNE d’ORLEANS ( 1669-1728), duchesse de Savoie , reine de Sicile, reine de Sardaigne

« l’art de la soumission »

Elle était la fille de Philippe d’Orléans ( 1640-1701,) et d’Henriette d’Angleterre ( 1644-1670) qui lui transmit en héritage l’aînesse de la succession royale britannique ( tradition jacobite) , ce qui ne fut pas sans importance sur la famille de Savoie.

Cette nièce de Louis XIV était d’une bonne nature car elle ne semble avoir tiré que des qualités (sic, discrétion, soumission, fidélité) de l’éducation qui lui fut donnée plutôt mal que bien ( car sans réelle affection) par sa belle-mère, la célèbre princesse Palatine (1644-1670) avec laquelle son père s’était remarié en 1671.

Sa demi-sœur Elisabeth (1676-1744) épousera d’ailleurs en 1698 le duc de Lorraine, fils de ce même Charles V que la duchesse-mère Marie-Jeanne-Baptiste de Savoie-Nemours (105) avait failli épouser autrefois

En 1684, Victor-Amédée II (1666-1732) lui demande expressément sa main pour échapper à sa mère ( 105) fort hostile à ce mariage qui même français n’entrait pas dans sa politique . Cette manœuvre du jeune duc marque d’ailleurs solennellement la rupture entre le fils et sa mère pourtant très favorable à l’influence française ( on put même craindre que Louvois provoquât une intervention militaire française depuis Pignerol ou Casale afin de soutenir les prétentions de la duchesse-mère, mais en fait elle-ci n’osa aller si loin et finalement s’inclina devant un fils dont elle ne soupçonnait pas encore la vivacité et l’indépendance d’esprit.

Louis XIV ne put que s’incliner devant une telle prétention qui allait à l’encontre de ses propres ambitions mais qui en apparence sembler révéler (encore) les bonnes relations apparentes entre Versailles et Turin d’où la lettre du roi à son cher cousin piémontais : » l’amitié que je porte au duc de Savoie ne peut être plus grande mais ce que nous venons de faire augmente encore nos liens de parenté… »Le jeune duc vint donc chercher son épouse au Pont de Beauvoisin, avant de l’épouser à Chambéry en mai 1684 et de rejoindre Turin où « Madame (mère)royale » (vint les accueillir « suivie de tout ce qu’il y avait d’hommes et de femmes de qualité auprès de sa personne ».

Un autre intérêt de la jeune souveraine consiste dans l’héritage reçu de sa mère des droits de la maison d’Orléans à la succession anglaise

Certes en 1690, son mari lui donne le charmant petit château d’été qui aux portes de Turin, appartenait jusqu’alors à sa cousine Ludovica (101 A) veuve de l’ex-cardinal Maurice de Savoie) et qui en revenant à la jeune souveraine prit le nom de « Vigne de la Reine ». Néanmoins elle mit du temps à avoir un fils né seulement en 1699, ce qui désespéra son mari , pourtant ses deux premières filles charmantes et vives lui donnèrent pleine satisfaction mais hélas, il fallut s’en séparer ! les deux sœurs épousèrent leurs cousins, les deux frères petits fils de Louis XIV . Adélaïde (136) devenait duchesse de Bourgogne promise au trône de France alors que Marie-Christine ( 137) devenait duchesse d’Anjou et finalement reine d’Espagne.

La pauvre souveraine déjà peu heureuse en mariage, connut au début du siècle une série de catastrophes qui la brisèrent définitivement, d’abord la grande invasion française de 1707 qui l’obligea à fuir devant ses compatriotes et son propre frère Philippe d’Orléans ( le futur régent ) , puis les décès successifs de ses filles à Versailles (en 1712) et à Madrid (en 1714) et enfin en 1715 la disparition de son fils aîné, le prince de Piémont qui rendit encore plus violent et irrémédiable l’antagonisme entre son mari et son second fils et nouvel héritier Charles-Emmanuel ( III).

Certes en 1713, elle part en grande pompe à Palerme pour accompagner son époux qui vient prendre possession de son nouveau royaume, ce qui lui vaudra un couronnement solennel et un séjour délicieux mais combien amer puisqu’il faut revenir sur instructions des grandes puissances dont la France représentée par son propre frère, le régent) qui reprennent la Sicile en la compensant par le piètre cadeau de la misérable Sardaigne où bien entendu le couple royal ne mettra jamais les pieds….

Elle meurt tristement, solitairement et pieusement en 1724 ( peu de temps après sa belle-mère) oubliée depuis longtemps par son mari qui s’intéresse activement à la comtesse de Spigno ( 137 A) qu’il épousera peu après….

105,136, 137, 138,


136/ MARIE-ADELAIDE DE SAVOIE (1685-1712) ,

duchesse de Bourgogne

« la courte apparition d’une grâce »

fille de Anne d’Orléans (135) et de Victor-Amédée II

Elle a une enfance un peu terne entre une mère aimante certes mais un père égoïste, personnel, mêlant l’indifférence et l’intérêt, sans affection

Dès avril 1696, dans la foulée de la paix de Ryswick qui réconciliait Turin et Paris, les diplomates et les ministres discutent sur son mariage éventuel avec le petit-fils de Louis XIV, le duc de Bourgogne. Ce ne fut pas rien du fait de l’habileté et de l’esprit retord du duc de Savoie qui dans son avarice ne veut pas donner trop d’argent à sa fille et qui joue sur sa jeunesse pour retarder la décision finale et amener le roi à toujours plus de concessions. C’est ainsi qu’on invoque la possibilité d’une autre union avec un fils de l’empereur, la nécessité pour la jeune fille de renoncer à ses droits dynastiques ( ce qui pose la question d’une loi salique jouant en Piémont comme en France pour écarter les femmes du trône) , il ne faut pas moins de six mois pour régler toutes ces questions. Le duc pouvait peut-être en se forçant un peu, se lamenter sur la perte d’une charmante fille, il n’empêche qu’il récupérait avec une joie évidente la place de Pignerol prise par les Français depuis plus d’un demi siècle.

Partie de Turin avec une escorte réduite, elle rencontre enfin à Nemours la famille royale et le duc de Bourgogne « ravi de sa charmante fiancée » A peine plus âgée que Adélaîde ( il est né en 1682), ce jeune homme intelligent , et bien éduqué ne manque pas d’éblouir sa jeune épouse mais aussi de la surprendre par son émotivité et son irascibilité…

Dans une cour vieillissante et déjà fatiguée ( en 1690, on a déjà subi la mort de la dauphine et celle de la reine), la jeune duchesse va tout de suite s’imposer par sa vitalité, son esprit et sa grâce. Elle séduit Louis XIV ( qui la couvre de compliments et de bijoux) et même madame de Maintenon (qu’elle appelait gentiment « ma tante », ce qui ravit la vieille dame » Elle est parfaite en tout, ce qui surprend bien agréablement dans une personne de onze ans… » ), mais il lui fallait bien tous ces appuis contre une foule d’ennemis contrariés ou jaloux ; ainsi les tantes (illégitimes) de son mari : la duchesse de Bourbon et la princesse de Conti mais aussi son beau-père, le grand-dauphin systématiquement jaloux et amer et enfin la princesse palatine d’Orléans ( qui n’avait jamais aimé sa mère et qui détestait madame de Maintenon). Cependant optimiste, gaie et courageuse, elle s’imposa par son esprit et par sa grâce aussi bien dans les chasses que dans les fêtes ou dans les exercices d’intelligence. Elle, qui était arrivée en octobre 1796, n’épousa le duc qu’en décembre 1697, et le mariage ne fut consommé qu’en octobre 1699

En 1700, les ducs de Bourgogne et de Berry partent en Espagne avec avec leur frère Philippe devenu roi . On rapporte alors que c’est Adélaïde qui inspira Louis XIV sur le choix de sa sœur comme épouse de Philippe .

En 1702-1703 , la guerre reprend , la France défendant Philippe d’Espagne contre une coalition européenne à laquelle participe le propre père d’Adélaïde désormais écartelée entre les deux camps, même si de fait elle est (obligatoirement) fidèle à sa nouvelle patrie. Le duc de Bourgogne rejoint les armées au combat la laissant seule à Versailles en butte aux calomnies sur une série de liaisons amoureuses, le pire étant l’ironie de la duchesse d’Orléans ( ex princesse palatine) qui ne l’avait jamais aimée ( pas plus d’ailleurs que sa mère que la duchesse avait élevée autrefois)

En 1704, naissance d’un premier fils qui meurt bientôt hélas

En 1705- 1706, la guerre bat son plein, les Français assiègent Turin dernière place de Victor-Amédée II qui résiste vaillamment mais il faut attendre la venue des secours autrichiens avec le cousin Eugène de Savoie-Carignan pour que l’on puisse s’apercevoir enfin de la retraite des Français. C’est pendant ces tristes années que le duc de Bourgogne va se voit accuser d’incapacité militaire et de couardise, ce qui amène Adélaïde à intervenir courageusement et violemment pour le défendre alors qu’au même moment certains l’accusent aussi de trahison pour informer son père des initiatives françaises en Italie du Nord ( ce qui expliquerait l’hostilité du duc de Vendôme à son égard)

En 1710, l’espoir revient avec la naissance d’un 3° fils, le duc d’Anjou et le mariage du duc de Berry avec Marie d’Orléans, sa cousine germaine

En 1711, à la suite de la mort du grand-dauphin, le duc de Bourgogne devient l’héritier officiel du trône et sa femme avec, année de triomphe et de joie d’autant que les hostilités s’arrêtent enfin.

Cependant au moment même des plus grands espoirs, les difficultés apparaissent pires que jamais. Tous les talents et toutes les perspectives d’avenir s’évanouirent en février 1712 lorsque la jeune princesse meurt brusquement ( à 27 ans) d’une rougeole épidémique qui emporte quelques jours après en mars, son mari et son second fils épargnant de justesse le troisième, le futur Louis XV  qui n’a que deux ans et dont la disparition eut été une catastrophe dynastique pour le royaume. On parle alors sans preuve ni raison d’un empoisonnement monté par le duc d’Orléans, neveu du vieux roi ( et futur régent) qui aurait tenté ainsi de liquider toute la famille royale.

 

Au moment de sa mort, au milieu de la cour consternée, à un prêtre qui lui disait « princesse , reprenez vie , guérissez, la France prie pour vous » elle répondit : » Princesse aujourd’hui, demain rien, dans deux jours oubliée ….»

 

NOAILLES A (de) Lettres inédites de Marie-Adélaïde de Savoye, duchesse de Bourgogne, précédées d'une notice sur sa vie (1850)

CLERON L. de ( Florenza Orsini) , Souvenirs d'une Demoiselle d'honneur de Mme la Duchesse de Bourgogne, 1861

BERTIERE S.: Les Femmes du Roi-Soleil,, 1998

135, 137, 138,


137/ MARIE-GABRIELLE DE SAVOIE   ( 1688-1714)

duchesse d’Anjou, reine d’Espagne

« une grande petite reine »

Au départ, tout commence bien, certes son père le duc Victor-Amédée II est bien sévère mais sa mère Anne d’Orléans (135) est aimante, sa grand mère Marie-Jeanne-Baptiste attentionnée (105) , son frère et sa sœur (136) plaisants. Cependant la vie ne peut s’écouler sans évènements, elle voit d’abord partir sa sœur Adélaïde appelée à Versailles puis en 1700 c’est la surprise lorsque ses parents reçoivent une lettre officielle de Louis XIV la demandant en mariage pour son petit-fils Philippe, ex duc d’Anjou devenu roi d’Espagne (1683-1746) qui dépassé par les évènements et un peu perdu dans la vie officielle madrilène songe à une épouse ( de plus Louis XIV espère bien par ce mariage amener le duc de Savoie à une alliance française dans la question si difficile de la succession d’Espagne, mais il en eut fallu davantage pour rallier le retord Victor-Amédée )

Le mariage est célébré en grande pompe à la chapelle du Saint Suaire en septembre 1701 puis c’est le grand départ, la jeune princesse quitte ses parents au col de Tende et gagne Nice où elle rencontre la vieille, mystérieuse et ambitieuse princesse des Ursins (en fait Orsini) tout juste nommée Camera Mayor par le gouvernement espagnol autant pour l’initier à son nouveau statut que pour la surveiller . Bien commencé le voyage se déroule néanmoins difficilement puisque retardé par les tempêtes et attristé par le départ progressif des Piémontais de l’entourage de la princesse désormais exclusivement espagnole.

A Figueras en Catalogne, elle rencontre enfin son époux pour sa plus grande joie « il est bien aimable » mais impossible d’en faire plus car la guerre suscitée par l’impérialisme français a éclaté et le jeune souverain se doit d’ aller défendre les parties italiennes, les plus menacées, de l’empire espagnol. Force est donc à la jeune souveraine de se rendre « seule » à Madrid d’autant plus méritante pour s’imposer et se retrouver dans un monde inconnu et fort difficile.

Certes le jeune Philippe s’impose assez facilement en Italie, remontant de Naples vers la Lombardie et rencontrant même son beau père à Alessandria, alors que Marie-Gabrielle se voit confrontée aux attaques navales anglo-hollandaises et à la nécessité d’un effort de guerre qui lui impose des interventions politiques auxquelles elle était vraiment très peu préparée dans un pays où l’on avait déjà peu l’habitude des politiques personnelles des souveraines, la situation est en plus aggravée par les manœuvres concurrentes et fort impopulaires de l’ambassadeur de France (le cardinal d’Estrée ) et de Madame des Ursins tout deux bien décidés à profiter de la situation pour s’imposer comme les vrais guides de la monarchie.

Heureusement Philippe revient en 1702 et l’on peut croire à un rétablissement de la situation mais hélas les évènements se bousculent pour rendre la situation presque intenable, en effet les alliés soutiennent les prétentions du fils cadet de l’empereur habsbourg (l’archiduc Léopold devenu Charles III d’Espagne) , les troupes ennemies débarquent un peu partout et suscitent la rébellion des provinces périphériques ,en particulier de la Catalogne , en tous les cas les Anglais s’emparent de Gibraltar et détruisent les flottes espagnoles. Certes le maréchal français Berwick arrive à faire une utile diversion au Portugal mais il n’empêche que la cour doit évacuer Madrid où entre Charles III , au moment même où l’on apprend le retournement de Victor-Amédée II qui , une nouvelle fois, change de camp et se retourne contre Louis XIV et donc contre son gendre, mettant la jeune reine dans une triste situation ce qui ne l’empêche pas d’apparaître à la tête de l’effort de résistance pour insuffler du courage aux autorités hésitantes , pour recruter des troupes , financer leur équipement tout en tremblant (surtout au moment du siège de Turin de 1706) pour ses parents dont elle est dorénavant isolée ( se contentant d’adresser à son père des lettres officielles pour lui rappeler ses engagements antérieurs et les promesses de Louis XIV en cas d’une nouvelle alliance). La naissance d’un premier infant héritier (Ferdinand) semble susciter un peu d’espoir mais la conjoncture s’aggrave encore sur le plan militaire (défaite espagnole d’Almiranza) comme sur le plan politique ( Louis XIV obligé d’intervenir dans les intrigues de Madame des Ursins rappelle momentanément cette dernière et son ambassadeur ) et sur le plan familial ( puisqu’au même moment Philippe perd son propre père, le grand dauphin et son frère le duc de Bourgogne et surtout l’épouse de ce dernier, Marie-Adélaïde, la sœur tant aimée de Marie-Gabrielle déjà affectée par le décès d’un second fils .

En 1710, on sent néanmoins un frémissement de reprise avec la campagne du duc de Vendôme vainqueur à Villaciosa , la possibilité du couple royal pour revenir à Madrid et surtout de nouvelles naissances au palais. Hélas ! la jeune reine épuisée tombe malade et n’assiste que de loin aux négociations du traité d’Utrecht confirmé en 1714 par celui de Rastadt qui garantit enfin la couronne à Philippe V ( même s’il doit renoncer pour cela aux vieilles terres espagnoles d’Italie et des Pays Bas) . Louis XIV envoie à Madrid son médecin Elvezio ( Helvetius) qui ne peut que constater l’état incurable de la souveraine qui s’ éteint en février 1714 « ayant conservé un jugement sain et une connaissance parfaite jusqu’au dernier moment de sa vie ». Selon Saint-Simon, « elle avait su se faire adorer des Espagnols par ses manières simples et affables et par la générosité de son âme »., d’où une « désolution universelle » lors de son décès….

Elle laissait un époux épuisé et accablé avec des enfants en bas âge donc dans l’obligation de se retrouver femme le plus vite possible, ce qui explique son remariage en décembre 1714 avec Elisabeth Farnèse, princesse de Parme (1692-1766) à laquelle avec une impulsion toute bourbonienne, il donna encore sept enfants . Tout avait été suggéré bien sûr par l’ambassadeur de France Alberoni et par Madame des Ursins qui n’en profita guère puisque la nouvelle souveraine peu reconnaissante la chassa immédiatement du palais royal l’obligeant en plein hiver à quitter l’Espagne pour aller mourir bientôt en Italie. Décidément l’Italie restait une terre essentielle dans l’horizon politique espagnol. En effet face à l’impérialisme autoritaire et orgueilleux des Français, les autorités espagnoles cherchaient d’utiles personnalités en Italie ce qui leur permit de se procurer presque en même temps de belles et grandes figures comme Marie-Gabrielle, Madame des Ursins, Alberoni et enfin la nouvelle reine Farnèse. ……

Marie-Gabrielle fut bien sûr rapidement oubliée, cependant l’opinion ne cessa de louer l’énergie de cette jeune femme « la Savoyana » qui en dépit de son inexpérience et de ses origines se dévoua sincèrement à son mari et à travers lui à son royaume , révélant une personnalité dont l’Espagne ne put profiter ( aurait-elle même été capable de la supporter longtemps ? )

Le régne de Marie-Gabrielle ne peut se concevoir sans l’ombre mystérieuse de Madame des Ursins dont on ne cesse de s’interroger sur la nature réelle, mère affective et évidemment envahissante pour la jeune souveraine ? une ambitieuse discrète mais obstinée ( n’essaya-t’elle pas d’obtenir une principauté en Flandre en 1713 ? ) ou une agent secret française ? ( d’où ses relations troubles avec madame de Maintenon ) .

Ces interrogations renvoient sur la perspective d’une reine qui eut fort affaire pour satisfaire les appétits sexuels de son mari ainsi que ses ambitions politiques , pour s’imposer à des autorités politiques très peu favorables normalement à une reine étrangère trop active et enfin pour résister aux intrigues d’une cour qui la considéra toujours plutôt comme un pion sur l’échiquier internationaL

BOTTINEAU Y.: L’Espagne sous les rois de la maison de Bourbon au XVIIII° siècle.

Mme SOUKY-DECOTTE: Mme des Ursins, roi d’Espagne. 1946

Cf : SAINT SIMON , Sur la princesse des Ursins , sur la reine elle même , sur Philippe V.

Cf l’énorme bibliographie sur Madame des Ursins et sur sa correspondance (

Lettres Inédites de Madame la Princesse des Ursins à M. le Maréchal de Villeroi : Suivies de sa Correspondance avec Madame de Maintenon ; Et précédées d'une notice biographique sur la vie de Madame des Ursins. Paris, Léopold Collin, 1806, XLVIII, 236 S.

SAINTE BEUVE : Causeries du lundi (1851-1881), 16 volumes (1804-1869)

- La princesse des Ursins. (1er article). Lundi, 16 février 1852.

- La princesse des Ursins. (2e article). Lundi, 23 février 1852.

- La princesse des Ursins. Lundi, 8 août 1859.

TESSE (Maréchal de). Lettres du Maréchal de Tessé à madame la duchesse de Bourgogne - Madame la princesse des Ursins - Madame de Maintenon - Monsieur de Pontchartrin, etc. Publiées par le comte de Rambuteau. Paris 1888. In-8, (1) f., portrait, (1) f., XXXI pp., 505 p.

Revue des Deux Mondes. La princesse des Ursins, sa vie, son caractère politique. Tome 23 : septembre et octobre 1859.

CERMAKIAN Marianne. Le dessous des cartes. Saint-Simon et la princesse des Ursins, Cahiers Saint-Simon, n°2, 1974, p. 31-40.

CHEVRILLON, SAINT RENE TAILLANDIER Madeleine Marie Louise : . La princesse des Ursins, une grande dame française à la cour d'Espagne sous Louis XIV. Paris, Hachette, 1926, 239 pages.

COMBES François (1816-1890,). La princesse des Ursins, essai sur sa vie et son caractère politique. Paris, Didier et Cie, 1858.

COURCY (, Marquis de). L'Espagne après la paix d'Utrecht 1713-1715. La princesse des Ursins et le marquis de Brancas. Un grand inquisiteur d'Espagne à la cour de France. Les débuts d'une nouvelle reine. Paris, Plon, 1891. -439 pp.

DUMAS A.. Le Chevalier d'Harmental, Chapitre VII "Alberoni"

KAPLAN , Francis. Duc de Saint Simon. Mémoires sur le règne de Louis XIV. Anthologie suivie. Textes choisis, annotés et préfacés. Paris, Flammarion, 2000, 1223 p.

"55. Le roi d'Espagne, la reine d'Espagne et la princesse des Ursins 198P.

MAINTENON(marquise de). Lettres à d'Aubigné et à Madame des Ursins intro. et notes de Gonzague Truc, Paris, , 1921,

MAINTENON (marquise de) : Lettres de Mme de Maintenon à diverses personnes, Amsterdam, chez Pierre Erialed, 1757, 9 vol.

- Correspondance avec la princesse des Ursins (vol. 8)

Lettres inédites de Mme de Maintenon et de Mme la princesse des Ursins, Paris, 1826, 4 vol.

- 1 lettre au roi d'Espagne et 83 lettres à Mme des Ursins, datées de 1713 à 1715, et autant de lettres provenant de cette dernière à partir de 1705.

- Lettres envoyées par Mme des Ursins (vol. 4)

LOYAU M. Correspondance entre Mme de Maintenon et la princesse des Ursins 1709: l'année tragique. Paris, 2002, 421 p.

135, 136, 142


 

137 A/ ANNA CARLOTTA TERESA , MARQUISE DE SPIGNO, ( 1680-1769) COMTESSE DE SAN SEBASTIANO….

Epouse morganatique du roi Victor-Amédée.

« Courtisée ou courtisane ? «

Curieux destin que celui de Anna Carlotta Teresa fille de Francesco Maurio du Canalis di Cuminana et de Francesca di San Martino d’Aglio. Belle, vive, active, tout paraît réussir à cette brillante héritière qui passe à 20 ans au service de Madame Royale ( 105/ Marie-Jeanne Baptiste) mère du duc Victor dont elle semble être devenue la favorite….

Nouvelle étape en 1703 quand la vieille duchesse-mère lui organise son mariage avec son écuyer Ignazio Novarina , comte de San Sebastiano , parvenu assez grossier ( son comté était trop récent pour être remarquable) qui ne semble pas pour autant avoir été un mauvais mari et qui en tous les cas lui donna sept enfants.

En 1723 nouvelle étape dans la vie de la dame, son mari meurt au moment même où elle passe au service de Polyxène de Hesse la belle fille du roi (139) , ce qui la rapproche encore davantage de ce dernier et ce qui explique la faveur de celui-ci d’autant qu’il s’éloigne toujours davantage de son épouse, Anne d’Orléans qui a la bonne idée de mourir en 1728. Le temps officiel du deuil étant passé, le roi s’empresse de l’épouser discrètement ( mais non secrètement) en juillet 1730 au moment même où soucieux d’une nouvelle vie et de vivre sa passion il se décide à abdiquer ( à l’instigation de son ancêtre Amédée VIII) . Dernier acte de son pouvoir, le roi Victor attribue à sa nouvelle épouse le titre de Comtesse de Spigno ( une seigneurie du Montferrat) et le couple royal se retire à Chambéry , bien décidé à profiter de la vie mais il en eût fallut bien davantage pour trouver le repos d’une retraite pourtant bien méritée…

Certes l’ex-souverain est bien plus âgé que sa femme ( 14 ans) mais en soi l’écart n’était pas si extraordinaire d’autant que la nouvelle marquise avait déjà eu l’habitude d’une telle différence. En fait chasser le naturel le fait revenir au galop et un homme aussi actif et énervé que Victor ne pouvait se contenter d’une vie recluse et provinciale d’où des interventions de plus en plus pressantes auprès de son fils et successeur auquel il n’arrive pas à accorder sa confiance.

On connaît la crise finale, le « vieux » souverain revenant en août 1731 sur son abdication et prétendant reprendre le pouvoir, d’où son arrestation le mois suivant , son transfert à Rivoli et l’année suivante à Moncalieri où il disparaît dans la colère et la fureur. On avait d’abord séparé le couple et conduit la « princesse » à Ceva avant de la ramener à son époux à Rivoli en décembre 1731. A la mort de celui-ci , on la conduisit à la Visitation de Pignerol où elle végéta tristement jusque dans un âge avancé puisqu’elle n’y mourut qu’en 1769 à 89 ans , la seule vraie joie dont elle put bénéficier encore fut la célébrité de son fils Paolo Federico héros de la bataille de l’Assiette contre les Français en 1747.

Bien sûr, tout cela peut-être considéré comme une histoire secondaire mais les questions ne manquent pas. Comment considérer son rôle ? fut-elle une courtisane qui s’ingénia à attirer un souverain toujours sensible au « beau sexe » ou au contraire est-ce lui qui n’eut de cesse de capter son attention ? ( on rapporta même que Marie-Jeanne Baptiste fut l’instigatrice de son mariage en 1703 pour la faire échapper aux manœuvres amoureuses de son fils ) mais surtout quel fut son rôle lors de la crise finale ? est-ce qu’elle contribua à l’ultime ambition du roi (comme le prétendit Mgr Gattinara, archevêque de Turin lors d’un débat du conseil royal en 1732 ) ou en fut-elle le témoin impuissant ? le mystère ou du moins le débat demeure : on ne fréquente pas impunément certaines grandes personnalités !

DE AMICIS E. : Alle porte d’Italia. Turin. 1899. 406 p.

BIANCOTTI A. : La regina di un re, la vita della marchesa di Spigna . Turin. 1940. 338 p.

GONTIER M. : Una carrozza per Pinerolo . Biografia della marchesa di Spigno .Pignerol..1995. 216 p. :


 138/ ANNE-CHRISTINE DE WITTELSBACH (1704-1723)

princesse de Piémont

fille de Théodore de Wittelsbach , duc palatin de Soulzbach et de Marie Amélie de Hesse -Rheinfeld

La tension diplomatique entre Turin et Paris ainsi que le mauvais souvenir de la mort de la duchesse de Bourgogne, tout poussa Victor-Amédée II à chercher de nouvelles relations matrimoniales pour son fils. Aucune Habsbourg n’étant disponible et d’ailleurs la rancœur du roi le poussant à ne vouloir pour son fils qu’une union politique sans aucune passion amoureuse, on chercha sinon au hasard mais sans grande attention dans des cours « neutres » d’où le choix d’une princesse bavaroise en 1722. En fait , quittant ou plutôt s’éloignant de l’orbite française, la cour de Turin retrouvait ses intérêts rhénans qu’elle avait oubliés depuis Adélaïde –Henriette (103) et Louise Christine de Savoie-Carignan devenue   de Bade-Bade ( 122) . Anne-Christine marquait d’ailleurs l’entrée des Hesse-Rheinfelds dans la grande vie diplomatique internationale.

Anne-Christine première épouse donc à Verceil en 1722 le prince de Piémont, Charles- Emmanuel (III)

Elle mourut en mettant au monde un fils qui la suivit rapidement dans la mort. Le pauvre Charles –Emmanuel qui perd aussi au même moment sa mère et sa grand mère, se retrouve bien seul face à un père de plus en plus hostile à son égard.

103, 135,136, 137, 139,


139/ POLYXENE-CHRISTINE DE HESSE-RHEINFELD –ROTHENBURG (1706-1735) princesse de Piémont, reine de Sardaigne

« un petit bonheur »

fille du landgrave Ernest Léopold de Hesse Rheinfeld et de Eléonore de Lowenstein , elle était la cousine germaine d’Anne Christine de Bavière ( 138) ), ce qui explique l’attention de Charles-Emmanuel qui l’épouse à Thonon en juillet 1724

Ils eurent six enfants ; Victor-Amédée (III, 1726-1796), Eléonore ( 1728-1791), Louise ( 1729-1767 , religieuse à Chieri) , Marie-Félicité ( 1730-1801) et deux fils morts très jeunes.

Il ne semble pas que la jeune princesse ait eu des problémes pour passer du protestantisme au catholicisme, ce n’en était pas moins le premier cas de conversion dans la Maison de Savoie

Au moment où Charles-Emmanuel pouvait se croire heureux sur un trône chèrement gagné et au milieu d’une famille chérie, Polyxène mourut. Décidément le pauvre roi ne pouvait se dégager de la malchance qui le poursuivait.

129, 138, 142


140/ ELISABETH DE LORRAINE (1711-1741) , reine de Sardaigne

« le dernier essai d’un roi malchanceux «

Fille de Léopold de Lorraine (1679-1729, fils de Charles V) et de Elisabeth-Charlotte de Bourbon-Orléans ( fille de Philippe d’Orléans, demi-sœur de la reine Anne d’Orléans 135 ) ,

Elle est la troisième épouse en 1737 (à Turin ) de son cousin Charles-Emmanuel III ( soit un an après le mariage de son frère François de Lorraine (1708-1765) avec Marie-Thérèse d’Autriche. Ce mariage perpétuait la tradition des relations avec la Lorraine commencée deux siècles plus tôt avec les Guise et les Nemours.

Ils eurent trois enfants dont deux moururent très jeunes et seul Benoît (futur duc de Chablais) survécut (1741-1808)

Elle aussi mourut en couches, avec encore quatre enfants survivants le pauvre Charles-Emmanuel resta veuf et inconsolable…

138,139


141/ ELEONORE (1728-1791) et MARIE-FELICITE DE SAVOIE ( 1730-1801)

seconde et quatrième filles de Charles-Emmanuel III et de Polyxène de Hesse, ( 139) elles restèrent célibataires par dévouement filial , choix tout à fait nouveau dans les vies princières.

Elles ont joué à Turin un rôle identique à celui des filles de Louis XV, modèles, gardiennes et surveillantes de la vertu et de la tradition.

139


142/ MARIE-ANTOINETTE de BOURBON-ESPAGNE ( 1729-1785)

princesse de Piémont, reine de Sardaigne

Une Espagnole productive ,

Elle était la dernière fille de Philippe V, mort en 1746, et d’Elisabeth Farnèse

Elle épouse à Oulx en 1750 Victor-Amédée (III, 1725-1795)) , neveu de la première épouse de son père (137), il a 25 ans, elle 21. ( Pour cette occasion on « exposa» le Saint Suaire ). Ce mariage concrétisait la paix retrouvée entre l’Espagne et le royaume de Sardaigne après la guerre de succession d’Autriche). Il n’empêche qu’elle ne fut reine qu’en 1773.

Victime d’une triste destinée, elle qui avait connu l’austérité de la cour d’Espagne, dut subir encore pendant plus de vingt ans la sévérité et la tristesse de son beau-père Charles-Emmanuel sans compter ensuite le sérieux (souvent forcé) de son mari . Tout ceci explique le souvenir sévère de cette princesse obsédée de vertu et de maternités.

Elle a eu neuf enfants de 1751 à 1766 ( plus 2 morts jeunes) mais finalement sans conséquence politique durable, quatre filles (en apparence) bien mariées mais sans avenir ( Marie-Joséphine (143/ 1753-1810), Marie-Thérèse (144/1756-1805), Marie-Caroline (146/ 1764-1782) , Marie-Anne( 146A/1757-1824) les deux premières (ainées) firent d’apparents beaux mariages alors que leurs deux sœurs cadettes durent se contenter d’unions plus modestes. Quant aux fils, trois sont devenus rois mais sans héritier mâle et   marquent la fin de la branche aînée Charles-Emmanuel (1751-1819), Victor-Emmanuel (1759-1824), Charles-Félix ( 1765-1831) d’autant que deux autres (Joseph de Maurienne (1766--1802) et Maurice de Montferrat ( 1762 -1799) ), victimes de leur santé et de la conjoncture révolutionnaire restèrent célibataires

Elle était la demi-sœur de Ferdinand V et de Charles III (l’un et l’autre successivement rois d’Espagne en 1746 et 1759 ainsi que de Philippe de Parme (1720-1766) qui avait occupé la Savoie pendant la guerre de succession d’Autriche avant de finir duc de Parme

En 1775, elle vient à Chambéry avec le reste de la famille royale pour recevoir Clotilde de France (145)sa nouvelle belle fille dont on a négocié le mariage avec le prince héritier Charles-Emmanuel. Clotilde est accompagnée par son frère, Louis comte de Provence ( futur Louis XVIII), qui avait déjà épousé une princesse de Savoie) qui nous a laissé un savoureux récit de son voyage et de ses hôtes , il nous décrit une souveraine ennuyée par un mari et un fils pieux, sévères et austères : » «La reine, infante d’Espagne, aurait préféré moins de jouissance en perspective dans l’autre monde et plus de plaisirs dans celui-ci.Elle n’en avait d’autre que celui de rire aux dépens des hommes et des femmes de la cour de Sardaigne, on m’a même assuré qu’elle ne dédaignait pas d’étendre ses railleries jusqu’à la haute bourgeoisie de Turin. Elle aimait la galanterie espagnole, les sérénades nocturnes et les assemblées d’éclat. Elle savait par cœur le règne de Louis XIV ( donc son grand père) et m’aurait presque demandé des noouvelles de toutes les personnes qui composaient sa cour… 

Elle mourut en 1785 à Moncalieri, à temps pour ne pas assister à la ruine (temporaire) de la famille.

Portrait 1759. Giuseppe Dupra

(potrtrait 1748)

portrait 1755 ( iuseppe Dupra)

portrait 1750. Jacopo Amigioni

  1. Beregadani, Vittorio-Amedeo III. Turin,1939

137, 140, 141, 146, 147, 152,


143/ MARIE-JOSEPHINE DE SAVOIE( 1753-1810)

comtesse de Provence, (dernière) reine de France.

« la reine velue »

fille de Victor-Amédée III et de Marie-Antoinette d’Espagne (142) , 3° d’une série de 12 enfants

elle était la sœur de Marie-Thérèse comtesse d’Artois (144), la belle-sœur de Marie-Antoinette de France, de la reine Marie-Clotilde (145) , de Marie-Thérèse de Modène-Este(147),

Louis XV, fils d’une princesse de Savoie était fort favorable à un rapprochement franco-sarde, soutenu dans cette tendance par le baron de Choiseul, son ambassadeur de France à Turin et cousin du ministre partisan d’une grande entente monarchique européenne autour des Bourbons et des Habsbourg. Après une enfance manifestement morne dans une famille profondément tournée vers l’Espagne dans une cour versée dans un modèle prussien, elle épouse donc en 1771, Louis, comte de Provence ( le futur Louis XVIII, , 1755-1824)

Les négociations prénuptiales se déroulent facilement, le roi Victor donne à sa fille 420.000 livres de dot plus 30.000 de bijoux et de son côté le roi Louis lui en accorde pour 300.000 plus une rente annuelle de 60.000. En juin 1773, le mariage est célébré à Turin avant le grand départ et la séparation familiale à Avigliana . Par Chambéry et Lyon, le convoi arrive enfin à Fontainebleau puis à Versailles où la nouvelle princesse est présentée solennellement à la cour au milieu de fêtes grandioses.

Les impressions ne sont pourtant guère favorables : selon le comte de Mercy-Argenteau : "Sa contenance est froide, embarrassée, elle parle peu, sans grâce et elle n'a rien de ce qui est nécessaire pour plaire à cette nation". Pour Pisandat de Meirobert dans les Mémoires Secrets : " Cette princesse est très brune : elle a d'assez beaux yeux mais ombragés de sourcils très épais ; un front petit ; un nez long et retroussé ; un duvet déja très marqué aux lèvres." Seul Louis XV se montre favorable en écrivant à l’infant Ferdinand de Parme "J'arrive de recevoir la comtesse de Provence. Elle est très bien faite, pas grande, de très beaux yeux, un vilain nez, la bouche mieux qu'elle n'était, fort brune de cheveux et de sourcils et la peau parfaite pour une brune" et plus tard "Sans être jolie, elle est très agréable et si j'avais quelques années de moins après l'avoir vue, je l'aurais bien prise pour moi."

A cet égard, Louis XV est l'un des très rares contemporains à présenter un portrait avantageux de Marie-Joséphine. Les autres décrivent avec complaisance ses sourcils en broussaille, ses moustaches ou son air emprunté. Un fait paraît certain : la princesse est affligée d'un système pileux développé. Une seule solution, se soumettre à la torture des pinces à épiler et des cires ! ( d’où le titre « la reine velue » du livre de Charles Dupêchez )

De toutes les façons, la cour de Versailles par sa splendeur mais aussi par ses excès et ses querelles de clan ne correspondait pas à une princesse introvertie et habituée à l’austérité et à la relative simplicité du palais royal de Turin. Le comte de Provence eut du mal à communiquer avec sa nouvelle épouse qui n’avait vraiment rien pour l’attirer, petite, un peu (trop) forte, timide, poilue (incapable de résister aux méprisantes appréciations des courtisans à son égard «  elle est mieux que je ne l’espérais » madame Campan étant encore la plus douce en mentionnant « d’assez beaux yeux et un certain air fier et dédaigneux ». Elle s’attire vite le mépris et la méfiance de sa belle- sœur la reine Marie-Antoinette qui s’arrange pour l’isoler et la ridiculiser , d’autant que la pauvre Joséphine ne peut compter que sur la Du Barry et le duc d’Aiguillon ( grands ennemis de la reine) vite disgraciés, ni sur sa sœur et belle-sœur Marie-Thérèse qui reste assez indifférente et au pire méfiante., il y aurait aussi pour jouer en sa faveur la princesse de Lamballe,(132) sa cousine et compatriote mais cette dernière est elle-même assez rapidement mise en disgrâce alors que sa remplaçante auprès de la reine, la duchesse de Polignac lui est franchement hostile. Bref, la pauvre femme est isolée, bénéficiant de la seule amitié de ses pieuses belle-sœurs Elisabeth et Clotilde dont elle va se faire la championne du mariage avec son frère Charles Emmanuel . Louis XVIII rappelera plus tard avec cynisme dans ses mémoires un de leurs seuls accords dans leur refus commun de voir la comtesse recevoir a charge de surintendante des enfants de France sous le prétexte que la princesse issue d’une maison royale ne pouvait se mettre au service de personne , refus qui mit la reine en fureur pour la plus grande joie de sa belle-sœur ravie de se venger ainsi des incessantes brimades reçues et du mépris dont elle était entourée

S’y ajoute bientôt la difficulté (et l’impossibilité) d’enfanter qui la remplit de honte et d’amertume, mais qui surtout accentue encore les sarcasmes de ses ennemis, d’autant que personne ne veut mettre en question la compétence de son époux. Voulant éviter les mêmes commentaires que ceux déversés sur son royal frère , le comte de Provence s’était vanté d’aune excellente nuit de noces alors que la jeune princesse déclarait s’être aperçue de rien .Enfin et sans doute en lien avec la précédente situation, il faut compter sur l’indifférence de son époux qui a pris dès 1776 ( l’impétueuse et ambitieuse madame de Balbi comme maîtresse et confidente. Tout ceci explique facilement la tristesse de cette pauvre femme qui ne peut manquer de se réfugier dans l’alcool et dans l’affection de sa lectrice Madame de Gourbillon, amie douteuse et maladroite qui contribuera grandement à la réputation de la princesse comme lesbienne. ( déjà initialement son amitié pour Madame de Balbi avait causé un fort émoi à la cour et auprès du couple royal) Décidément rien ne lui est épargné et l’on comprend l’importance pour elle de sa villa de Montreuil (« sa folie » ) loin de Versailles où elle peut couler des jours heureux et tranquilles mais néanmoins assez rares, loin de Versailles des avances de Madame du Barry et de réserves du parti autrichien enfin elle doit compter avec les critiques unanimes sur sa malpropreté et sa « mauvaise bouche » sur laquelle même l’ambassadeur de Viry désespère d’obtenir des traitements efficaces « je souhaiterais aussi que le roi et la reine lui fissent légère insinuation sur les soins qu’elle doit donner à sa coiffure et à l’entretien de ses dents . Je souffre d’être véritablement en cas de parler de ceci à votre excellence ( le ministre) mais ces sortes de choses qu’on regarde comme des minuties ailleurs sont des affaires essentielles dans ce pays-ci… »

1789 avait mal commencé avec la disgrâce de sa favorite et des accusations de plus en plus graves sur ses excès de la princesse qui n‘en fut que plus mélancolique, bien entendu, absorbée par ses problèmes personnels, elle n’a pas vu arriver la Révolution qu’elle subit néanmoins sans réagir ni aux intrigues de son mari ni à son déménagement à Paris (au palais du Luxembourg) et encore moins à leur fuite en juin 1791 au même moment que celle de la famille royale. Leur aventure mieux organisée que celle de cette dernière réussit, car la comtesse séparée de son mari a pu le retrouver assez facilement à Namur ( pour y apprendre bien sûr l’échec de la fuite de Louis XVI et de Marie-Antoinette mais aussi pour constater que le comtesse de Balbi sa rivale est toujours là) ) .

Commence alors l’aventure de l’émigration qui mène à son comble le malheur de cette pauvre princesse. Le couple intitulé dorénavant « comte et comtesse de Lille » s’installe d’abord avec les « Artois » à Turin, où ils sont d’ailleurs bien accueillis d’autant que la ville regorge vite d’émigrés français connus. Cependant il faut compter avec l’austérité d’une cour que les princes trouvent bien tristes ainsi qu’avec la prudence des ministres désireux de ne pas compromettre les relations franco-sardes. D ‘ailleurs dès 1792, la conjoncture se détériore avec la radicalisation des évènements français et la guerre déclarée durant l’été et accélérée ensuite sans aucun succès pour la cause sarde . le comte de Provence quitte le Piémont n’y revenant que passagèrement au début de 1794 tout juste pour y entrevoir son épouse début de 1794, Aussi sitôt après 1796, l’armistice de Cherasco qui met le Piémont hors de la coalition, après la mort de VIctor-Amédée III et l’avènement de Charles-Emmanuel IV bientôt soumis aux exigences du Directoire, il n’est plus question pour elle de demeurer à Turin, d’où un nouveau départ et cette fois dans l’inconnu. Certes elle est désormais reine de France ( et dorénavant elle ne cessera d’être appelée ainsi) mais encore faut-il savoir pour qui ? avec quelles ressources ? et dans quel but ?

Deux années d’errance seule, pauvre et triste en Allemagne pour enfin rejoindre en juin 1799 son mari installé à Mittau en Lettonie grâce à la générosité du tsar où elle arrive juste avant sa nièce ( ex madame royale, fille de Louis XVI) et son neveu le duc d’Angoulème (fils de son beau- frère d’Artois) que la politique va marier peu après, moment de grâce et d’illusion éphémère car le climat peu favorable et la conjoncture rendent bientôt le séjour du couple (maintenant royal) difficile. Il faut en 1801 s’installer à Varsovie où le roi de Prusse leur laisse le château de Lazienski jusqu’en 1804 où contraints de repartir ils reviennent à Mittau qui leur permet de rester jusqu’en 1807, date de la paix franco-russe de Tilsitt qui de nouveau les éloigne cette fois vers l’Angleterre. La « reine » y débarque en août 1808 avec sa nièce d’Angoulême pour y retrouver leurs époux qui entre temps ont réussi à emménager au château d’Hartwell près de Londres .

Commence alors la dernière étape de la pauvre souveraine, une vie calme, retirée, assez médiocre car les aides financières du régent d’Angleterre et du tsar peuvent tout juste suffire à entretenir le couple princier. Certes elle est respectée et honorée de tous, en relations bienveillantes même si néanmoins sans chaleur avec son mari mais elle souffre de plus en plus des yeux, du foie et du pylore et bientôt d’hydropisie, déclin qui lui fait accepter la mort sans trop de difficulté en novembre 1810. « mon âme souffre cruellement ! ma consolation est de penser à sa mort la plus courageuse et la plus édifiante qui fut jamais «  écrit Louis XVIII qui rajoute deux jours après  » plus de larmes, plus d’angoisses, mais un regret sincère, un vide dans ma vie que je sens cent fois par jour.. « De toutes les façons l’histoire où elle a joué finalement si peu de place, continue sans même entretenir son souvenir.

Elle est enterrée solennellement et provisoirement à Westminster d’où elle est transférée en 1811 à Cagliari mais il faudra attendre l’arrivée de son frère Charles-Félix au trône quinze ans plus tard pour qu’on ait le temps, l’idée et l’argent de lui faire un tombeau correct. Notons cependant que son mari «  l’oublia » en Sardaigne puisqu’elle ne fut jamais ramenée à Saint-Denis

Louis XVIII, dans ses mémoires, éditées à Bruxelles en 1833 par Louis Hauman et Compagnie, libraires, raconte :

« Cette année 1810 devait m'être défavorable, qui se termina par la mort de la reine ma femme, expirée à Goldfield Hall, le 13 novembre 1810. Cette excellente princesse, à laquelle nos infortunes m'avaient doublement attaché, les avait supportées avec une magnamité peu ordinaire : tranquille, lorsque les amis vulgaires s'abandonnaient à leur désespoir, jamais elle ne fit un de ces actes de faiblesse qui abaissent le dignité d'un prince. Jamais non plus elle ne me donna aucune peine d'intérieur, et elle se montra reine dans l'exil comme elle l'aurait été sur le trône. Sa gaieté douce me convenait ; son courage que rien ne pouvait abattre, retrempait le mien ; en un mot, je puis dire de la reine ma femme ce que mon aïeul Louis XIV dit de la sienne quand il la perdit : « Sa mort est le premier chagrin qu'elle m'ait donné ». La reine, âgée de cinquante-sept ans, eut non seulement tous mes regrets, mais encore ceux de mes proches et de nos serviteurs. La famille royale me prodigua dans cette circonstance une foule d'attentions délicates et soutenues. Elle voulut que les restes de Sa Majesté fussent ensevelies à Londres avec tous les honneurs rendus aux reines de France dans la plénitude de leur puissance. C'est à Westminster que reposent ces chères dépouilles ; puisse la terre leur être légère ! Je suis convaincu que l'âme qui y logeait habite aujourd'hui les régions célestes où elle prie avec les bienheureux de notre famille, pour son époux et pour la France. »

Joséphine de Savoie, comtesse de Provence en nymphe de la chasse ( 1770)

Joséphine de Savoie enfant

REISET G.A.H. : Joséphine de Savoie, comtesse de Provence. Paris, 1913, 303 p.

DUPECHEZ CH.: La reine velue, Marie-Joséphine-Louise de Savoie, dernière reine de France. Paris, 1993, 125 p.

132, 142, 144, 145, 146, 147, 152


 

144/ MARIE-THERESE DE SAVOIE (1756-1805),

Comtesse d’Artois

« victime de la Révolution et de son mari »

fille de Victor-Amédée III et de Marie-Antoinette d’Espagne, (142) sœur de Marie-Joséphine de Provence (143)

Dès 1772, on pose la question de son mariage avec Charles, frère de Louis XVI, comte d’Artois aussi bien à Paris qu’à Turin, ce qui ne veut pas dire sans hésitation car Victor-Amédée III ne veut pas trop se mettre sous le joug diplomatique français d’autant que certains pensent marier le beau, jeune et déluré comte d’Artois avec une Condé. Enfin tout s’arrange et la princesse arrive finalement à Versailles en novembre 1773.

Face à une sœur unanimement critiquée, elle fait au début bonne impresion "Elle est très bien, un peu petite, une belle peau ainsi que la gorge, le nez fort long et ressemblant fort à son père le roi de Sardaigne". Ecrit Louis XV à l’infant de Parme même si l’ambassadeur Mercy d’Argenteau se montre une nouvelle fois fort critique :: " Elle est fort petite, médiocrement prise dans sa taille ; elle a le teint assez blanc, le visage maigre, le nez fort allongé et désagréablement terminé, les yeux mal tournés, la bouche grande, ce qui forme en tout une physionomie irrégulière, sans agréments et des plus communes. Mais ce qui est bien plus fâcheux encore pour cette princesse, c'est la disgrâce de son maintien, sa timidité et son air embarrassé ; elle ne sait prononcer une parole. Elle danse très mal et n'a rien qui n'annonce en elle, ou le défaut de dispositions naturelles, ou une éducation excessivement négligée. Tout le public en a jugé ainsi et son premier coup d'oeil a été trés défavorable pour Mme la comtesse d'Artois".

Comme d’habitude, les fastes du mariage terminés, il fallut envisager une situation assez complexe. Une fois de plus le couple était bien mal assorti car face à la légèreté de son mari, la jeune comtesse afficha rapidement une raideur qui ne pouvait lui attirer la faveur d ‘une cour réputée pour sa frivolité. Elle eut la fâcheuse tentation de trop fréquenter les filles de Louis XV ( tantes de son mari) qui cultivaient la rigueur morale face à la favorite Du Barry pourtant à l’origine de son mariage. Marie-Antoinette afficha tout de suite la même réserve qu’elle avait manifestée contre sa sœur ( 143)

Alors que madame Campan lui reconnaît « un très bon teint et un visage gracieux… », La barone d’Oberkitch la décrit avec « une petite stature , un caractère doux, elle était ingénue d’un caractère doux et dotée des plus admirables qualités avec une belle carnation mais un nez un trop gros… » . Elle n’en suscite pas moins peu de sympathie du fait semble-t-il de sa peur d’en faire trop et finalement de sa réserve un peu froide, sans grande relation avec sa sœur envers laquelle elle semble avoir manifesté quelque jalousie puisqu’elles n’avaient pas le même rang dans la préséance des cérémonies ni la même situation dans les perspectives familiales ( Marie-Joséphine pouvait avoir encore des enfants et ainsi la faire reculer dans l’ordre de succession).

En 1775, on croit voir la situation évoluer. Louis XV est mort l’année précédente et la Du Barry a dû se retirer , mais surtout Clotilde,(145) la sœur du nouveau roi, avec laquelle elle avait quelque peu sympathisé, part à Turin épouser son propre frère, le prince héritier Charles-Emmanuel IV, événement qui semble révéler un parti piémontais à Versailles, ce qui accentue la colère de Marie-Antoinette toute puissante maintenant qu’elle est devenue reine. Promotion qui a accentué aussi les débauches du comte d’Artois ouvertement protégé par la reine et qui s’affiche publiquement et confusément avec les comtesses de Guiches, de Contat et surtout de Polastron comme aussi avec des artistes (la Duthé ou la Lange), ou avec des étrangères comme lady Barrimore.

Certes, Marie-Thérèse fit ses preuves en mettant au monde quatre enfants , deux filles moururent en bas âge mais les deux garçons survécurent : Louis d’Angoulême ( 1775-1844) et Charles –Ferdinand de Berry ( 1778-1820). Cependant il en eût fallu beaucoup plus pour renverser la situation. Face à une femme qui se sentait dorénavant plus mère qu’épouse, Charles d’Artois quitta presque le foyer conjugal au grand dam de l’ambassadeur sarde à Paris, le comte de Viry qui ne voulait pas voir les princesses compromettre par leurs raideurs ses manœuvres pour une alliance franco-sarde. En plus arriva la calomnie d’une liaison avec un officier de la garde, Des Granges qui fut arrêté et eut bien du mal à se disculper ce qui n’empêcha pas la permanence des méchancetés jusque dans les mémoires de la comtesse de Boigne écrite une génération après.

Tout change de genre en juillet 1789 avec le départ de la famille d’Artois qui inaugure ainsi le grand mouvement de l’émigration. Marie-Thérèse se retrouve donc à Bruxelles puis en Allemagne, mais en septembre on se fixe enfin à Turin où tout pourrait bien continuer si ce n’était la présence de Madame de Polastron dont Charles d’Artois ne peut se passer, d’où une grave crise mystique de la princesse refusant toutes les cérémonies de la cour et se déclarant ouvertement pour une retraite dans un couvent, décision rendue vaine par l’intervention massive de toute la famille royale atterrée d’une telle perspective.

Elle vit partir d’abord sans regret son mari (et sa maîtresse) mais en 1795 elle pleura vivement ses fils rappelés par leur père à l’armée des émigrés de Coblence. C’est donc dans la plus complète solitude qu’elle vit mourir son père puis partir sa sœur Marie-Joséphine, préférant rester à Turin dans l’ombre de son frère le nouveau roi Charles-Emmanuel et de sa belle-sœur la reine Marie-Clotilde (145) qui lui prodigua son affection et son appui dans une situation de plus en plus critique aussi bien à Turin face aux officiers français occupant le pays et que dans une Europe bouleversée et oublieuse de l’ancienne dynastie de France.

En décembre 1798, il fallut quand même quitter Turin en même temps que le reste de la famille royale. Après bien des errements, elle se retrouva finalement à Klagenfurt en Carinthie dans l’incapacité de se rendre à Mittau pour assister à la noce de son fils le duc d’Angoulême avec sa nièce, ex-madame royale, auxquels elle dut se contenter d’envoyer un nécessaire de toilette en cadeau de mariage. La guerre l’obligea en 1804 à s’établir à Graz plus sûr que Klagenfurt. Certes elle revit de temps en temps son fils Berry mais elle n’avait rien à espérer de son mari installé maintenant en Angleterre même après la mort de Madame de Polastron et bien décidé à ne pas s’encombrer d’une épouse gênante et triste. Désespérée, elle se laissa mourir en juin 1805, demandant seulement que l’on mette son cœur dans le tombeau de sa belle-sœur Clotilde à Naples, décision mal venue à la veille d’une nouvelle guerre qui amena les Français dans cette dernière ville et il fallut attendre une dizaine d’années pour voir la réalisation d’un vœu pourtant bien simple. En 1836, son (ex) mari vint mourir pas trop loin de Klagenfurt à Goritz ( Gorizia) où il fut rejoint plus tard dans la mort par le duc et la duchesse d’Angoulême mais personne ne songea alors à rassembler les corps d’une famille à laquelle plus personne ne pensait, le couple d’Artois resta donc séparé à jamais. La pauvre princesse était vraiment destinée à vivre le martyr de la solitude……

OCCELLA P. : Il matrimonio della principessa Maria Teresa di Savoia col conte d’Artois.   Turin, 1877.

132, 142, 143, 145, 146, 147, 152


145/ MARIE-CLOTILDE DE BOURBON, (1759-1802) , princesse de Piémont , reine de Sardaigne

« plus religieuse que reine «

Elle avait été à Versailles le 7° enfant de Marie-Josephte de Saxe ( 1731- 1767) et du grand-Dauphin Louis ( 1729-1765 ) mais après avoir perdu déjà deux frères, elle fut orpheline très tôt et dût se résigner à vivre seule avec ses trois frères aînés ( les futurs Louis XVI, Louis XVIII et Charles X) et sa sœur cadette ( la future malheureuse Elisabeth) sous la direction de sa grand-mère Marie Leczinska dans une atmosphère évidente de piété plus que de lumière.

En 1775, dans le cadre du rapprochement politique entre la France et la Sardaigne, elle épouse à 16 ans Charles-Emmanuel, prince héritier de Sardaigne ( 1751-1819) son aîné de huit ans, mariage disproportionné et en particulier par l’allure des deux époux, elle vive, débordante de santé, forte pour ne pas dire obèse ( comme ses parents et comme ses frères Louis) d’où ses surnoms « gros Madame » « la grosse Bourbon » , lui renfrogné, maladif, épileptique ( ?) et maigrichon. Ce fut le troisième et dernier mariage franco-sarde après ceux de ses deux frères Louis de Provence et Charles d’Artois avec les deux sœurs de son mari, Marie- Joséphine 143)et Marie- Thérèse (144) .En1771 et 1773, la Maison de Savoie adhérait ainsi pleinement au pacte de famille ( des Bourbons) conçu par Choiseul en 1761 pour établir la paix européenne. Marie-Joséphine de Provence avait beaucoup œuvré pour ce mariage : » On dit que Madame Clotilde épouse mon frère. C’est une excellente acquisition à faire. Pour la figure, elle est très bien, une belle physionomie, de beaux cheveux blonds, des yeux bleus et bien taillés, un teint admirable,, elle est fort grandie depuis que je suis ici et même un peu maigrie.Elle est parfaitement bien réglée » ce dont doutait pourtant son père le roi Victor très sceptique sur les « possibilités » des femmes fortes : « Dans ce pays, toutes les françaises qui y viennent , prennent de l’embompoint . Vous n’ignorez pas la préférence marquée que Piémont ( Charles-Emmanuel) dès son enfance a eue pour les femmes minces et élancées et son éloignement décidé pour les femmes grasses… » , en bref une union mal inaugurée….

Les mémoires de Louis XVIII qui avait accompagné sa sœur, racontent ironiquement le mariage de celle-ci à Chambéry en présence de toute la famille  royale : le roi et son frère Chablais à la piété scrupuleuse et austère, la reine pleine d’ironie, les princes « insignifiants », les princesses Artois et Provences toutes en excès contraires . On joua une pièce de Ducis qui fit rire tout le monde à propos d’un « roi au charme inexprimable » ( on avait pourtant supprimé in extremis une pièce de Guilbert du fait d’une allusion à un traitre issu de la famille royale) , on se querella sur les questions de préséance , sur les prétentions des courtisans piémontais et des autorités savoyardes comme sur les « sottises » de l’ambassadeur Viry .

Clotilde dut encore attendre près de 20 ans pour se faire reconnaître le titre de souveraine, temps agréable de fêtes, de voyage entre le château royal de Turin et les demeures voisines de Stupinigi, de Veneria Reale entre Milan et Thonon, entre Nice et Aix. Bien sûr il y a en filigrane le regret d’un mariage stérile , cas extrêmement rare dans la maison de Savoie et politiquement désastreux car en dépit de la nombreuse famille de Victor -Amédée III les mariages y sont peu nombreux et peu productifs, que va donc devenir la monarchie à moyenne espérance ? Enfin il y a naturellement un peu d’humiliation car le couple princier n’a pas fière allure, lui de petite taille et chétif, elle au contraire forte et de belle taille

Au printemps 1789, l’humeur de Marie -Clotilde ne peut être bonne car l’arrivée à la cour de Turin de la nouvelle duchesse d’Aoste, Marie-Thérèse de Modène -Este (147) lui fait entrevoir la perspective d’un héritier du trône né hors de son couple ( ce qui n’aura pas lieu finalement) enfin elle ne peut que s’inquiéter de l’ouverture des Etats Généraux de Versailles. Les évènements lui donnent raison car   peu après Clotilde reçoit ses frère d’Artois et Provence venu se réfugier à Turin avec leurs tristes épouse mais le plaisir des retrouvailles ne saurait dissimuler la montée dess périls. En 1791, Clotilde voit ainsi passer ses tantes (filles de Louis XV) qui gagnent Rome pour s’éloigner de l’agitation du royaume, mais quel effondrement d’apprendre aussi l’arrestation de Louis XVI et de sa famille à Varenne , ce n’est ainsi que le début d’une longue inquiétude sur le sort de son frère « de France » dont l’exécution en janvier 1793 va littéralement la briser .La cour de Turin s’enfonce dans la tristesse : « " Le prince de Piémont répare un extérieur peu agréable par beaucoup d'esprit, autant qu'on peut en juger en si peu de temps et à ce que l'on assure par des qualités essentielles. La princesse de Piémont, son épouse, que nous avons vue en France sous le nom de Mme Clotilde, et que vu son embonpoint on appelait "le Gros Madame" aurait à peine été reconnue d'aucun de nous, tant elle est changée, vieillie et maigrie. Elle a perdu ses dents et toute apparence de fraicheur. Elle a pourtant seulement trente ans. Elle n'a point d'enfants. Cela manque aujourd'hui à son bonheur car elle est parfaitement heureuse avec son mari qui a pour elle la plus profonde vénération, sentiment qu'elle a inspiré à toute la cour. Elle est d'une extrême dévotion et très scrupuleusement attachée à l'étiquette de cette cour qui n'en est que plus triste.

Le prince de Piémont, né en mai 1754 est dans sa trente-neuvième année. Le duc d'Aoste, second fils du roi, né en juillet 1759, est extrêmement laid et ne nous a rien laissé préjuger de son esprit ni de son caractère. Il vient d'épouser il y a six mois, la fille aînée de l'archiduc Ferdinand. Cette jeune princesse, née le 1er novembre 1773, est d'une figure charmante, grande, bien faite, d'une tournure naïve et enfantine et parait dans cette cour d'autant plus agréable que tout ce qui l'entoure est d'une laideur amère.

Les trois autres fils du roi, le duc de Montferrat, le duc de Genevois et le comte de Maurienne, agés de vingt-sept, vingt-cinq et vngt-trois ans, ont encore si peu vu le monde qu'à peine ils savent parler. Un signe de la tête est tout ce qu'on peut obtenir. Ils mènent une vie très réglée et ne sortent pas encore sans leur gouverneur et un des trois ne quitte jamais les autres." (selon le comte d’Espinchal qui avait accompagné le couple de Provence) . En septembre 1792, l’arrivée des Français en Savoie l’avait déjà anéantie car c’était le signal de la guerre entre sa patrie d’origine et le royaume de son époux. Turin se remplit d’émigrés français et savoyards, la guerre de plus en plus proche menace le Piémont mais le prince héritier se tourne plus vers la foi que vers l’ardeur militaire. Le couple adhère ainsi publiquement au tiers ordre franciscain alors que l’armée sarde ne peut tenir face aux Français , 1795 fait culminer les malheurs car il faut subir l’attaque radicale du général Bonaparte, la défaite et la capitulation l’armistice de Cherasco et l’humiliant traité de Paris qui réduit le royaume en apparence à la neutralité et en fait à l’occupation et à la soumission,. C’est dans cette situation désespérée que le roi Victor-Amédée meurt à Moncalieri en octobre 1796 donnant enfin à Charles-Emmanuel l’occasion d’arriver au pouvoir, lourde charge pour un garçon timide et maladif peu aidé  par Marie-Clotilde de plus en plus triste et de plus en plus réservée.

L’austérité traditionnelle de la cour s’est muée d’ailleurs en un repli austère sur soi, le couple royal ne vit plus que dans l’ombre des « ducs frères » et encore le couple Victor-Emmanuel d’Aoste ( futur Victor-Emmanuel I°, héritier potentiel puisque Charles-Emmanuel et Marie-Clotilde n’ont pas d’enfant) ) – Marie-Thérèse de Modène-Este ( 147) propre nièce de la reine de Naples et de Marie-Antoinette) n’est ni joyeux ( lui aussi n’a pas d’enfants ) ni porté à l’ouverture, le couple Maurice de Chablais et Marie-Anne ( 146A -en fait sa nièce) est de la même eau , aggravée encore par l’inégalité des âges, et les trois ducs célibataires de Genevois ( futur Charles-Félix), de Montferrat et de Maurienne ne sont que des introvertis peu sociables. Une telle atmosphère ne pouvait pousser la reine à la gaieté et même à assurer pleinement son rôle. Enfermée au palais royal, se limitant à quelques intimes, écrasée par une actualité toujours plus inquiétante. En effet face à l’ apparition d’un mouvement jacobin qui encourage une sourde agitation dans tout le royaume, confrontée aux atteintes de plus en plus nombreuses contre l’autorité royale et contre la puissance ecclésiastique, soumise à l’obligation de rencontrer, même de temps en temps, les officiers ou dignitaires français souvent grossiers ou au mieux imbibés de l’esprit des lumières qui lui fait maintenant horreur, la pauvre reine vit un calvaire évident. dont elle ne cherche l’issue que dans une rigueur religieuse de plus en plus asociale.

Attendant le martyr, elle ne trouve que l’exil car en décembre 1798, les exigences de l’occupant ( alors le général Grouchy) se font plus décisives, la famille royale doit donc quitter Turin et dans la neige , la tristesse et l’ affolement quitter le royaume en direction du sud-est ( mais est-on même sûr de trouver là le calme tant espéré ?). La situation des Savoie semble alors désespérée puisque abandonnés de tous côtés, ils n’ont plus ni soutien apparent à l’intérieur , ni appui diplomatique à l’extérieur ( seul le tsar Paul manifeste encore son amitié mais il est bien loin) et faute d’aller comme prévu jusqu’à Rome ( d’où le souverain pontife est lui-même chassé pour être amené à Valence où il meurt misérablement) on s’arrête en Toscane mais celle-ci est menacée à son tour. En février 1799, une seule solution s’impose alors : passer en Sardaigne ultime possession de la dynastie qui n’avait jamais manifesté son intérêt pour ce domaine lointain, certes symbolique (puisqu’il garantit le couronne du royaume) mais tellement pauvre que l’on peut douter de sa valeur ( les Français n’ont d’ailleurs jamais songé à l’attaquer ni depuis le Corse ni même en se rendant en Egypte au printemps 1798 ) situation peu glorieuse mais cependant assez sûre car protégée par la marine anglaise qui croise en permanence en Méditerranée garantit encore sa sûreté ) . On s’installe donc comme des miséreux à Cagliari attendant des jours meilleurs. Le seul profit décisif pour Clotilde fut néanmoins sa rencontre avec un ancien jésuite le père Denes qui devint son confesseur et père spirituel. .

Contre toute attente, ils arrivent quand même à quitter la Sardaigne, en septembre dans l’espoir d’une restauration favorisée par la victoire de la seconde coalition austro-russe qui a envahi l’Italie du nord, mais il faut vite déchanter, le tsar Paul, qui a vainement demandé au Directoire le retour des Savoie à Turin disparaît et les Habsbourg qui se sont bien gardés de les rappeler à Turin lors de leur réapparition en Italie dans l’été 1799, sont définitivement battus et repoussés d’Italie à Marengo. On erre donc lamentablement en Italie centrale profitant du rétablissement des souverains traditionnels, que ce soit le grand duc de Toscane, le souverain pontife et le roi de Naples ( avec parfois des rencontres pittoresques comme celle près de Florence avec le grand homme de lettres Alfieri alors ouvertement favorable aux idées jacobines et françaises ) C’est durant une visite à Caserte près de Naples que le reine succombe en mars 1802 à une fièvre typhoïde, ( elle est inhumée peu après en l’église Santa Catarina du tiers ordre franciscain de Naples) mettant au comble de la détresse le pauvre Charles qui, désespéré, décide alors en juin 1802, d’abandonner titres et pouvoirs à son frère Victor, il lui en reste d’ailleurs si peu et il en est tellement dégoûté que cette renonciation est aussi facile qu’évidente.

Tout est fini au moins dans les aspects politiques car la vie continue, Le roi se retire définitivement à Rome chez les anciens jésuites ( ou ce qu’il en reste) et profitant de la restauration de l’ordre en 1814 il y entre au noviciat à côté de l’église Sant Andrea al Quirinale où il attendra encore quatre ans pour mourir en 1819. Entre temps, son beau-frère et son frère étaient revenus sur leurs trônes à Paris comme à Turin et Napoléon s’épuisait à Sainte-Hélène loin de tout comme lui mais forcé alors que lui pouvait s’enorgueillir de la liberté de son choix.

De toutes les façons, le couple n’attendait plus rien depuis longtemps., il mourut moins dans l’isolement forcé que dans la solitude voulue et supportée de plein gré, moins dans les regrets que dans la sérénité d’une foi chrétienne obstinée et confiante. Ils n’étaient plus de ce monde depuis longtemps, n’ayant plus rien à y faire, plus rien à espérer, ils disparurent donc discrètement ne laissant que de vagues souvenirs. Avec elle, la branche aînée des Bourbons perdait un de ses derniers rameaux, elle n’en avait d’ailleurs plus beaucoup donc elle n’en avait plus pour bien longtemps à survivre et les Savoie entraînés dans la même misère ne pouvaient guère espérer mieux.

Dès 1808, une certaine ferveur populaire avait proclamé Marie-Clotilde « ange tutélaire du Piémont » et elle fut bientôt déclarée « vénérable ». En 1933, le prince héritier Humbert, alors prince de Naples lui faisait édifier un tombeau et quarante ans plus tard il entamait avec le soutien des franciscains une procédure de béatification pour Marie-Clotilde

PERRERO D., I reali di Savoia nell‘esilio 1799-1806, Turin 1898.

DEGLI ALBERTI, Lettere inedite (Carlo Emanuele IV, Vittorio Emanuele I°, Carlo Felice, Carlo Alberto), Turin, 1901.

PIOVANO A. Clotilde di Savoia. Turin, 1987. 244 p.

REISET G.A.H.  : "Les lettres inédites de Marie-Antoinette et de Marie-Clotilde, Reine de Sardaigne. Paris, 1877. 404p.

142, 143,144, 146, 147,


146/ CAROLINE DE SAVOIE (1764-1782) princesse de Saxe

« Un entracte de bonheur »

fille de Victor-Amédée III et de Marie-Antoinette d’Espagne, (142) sœur des comtesses de Provence et d’Artois, ( 143-144)

Quatrième fille du roi Victor, elle s’imposa très vite par sa jeunesse, sa grâce et sa bonne humeur d’autant plus qu’aimée de toute sa famille et fort populaire à Turin, elle pouvait envisager l’avenir avec bonheur, d’où sa surprise et finalement son refus immédiat en apprenant la demande de sa main faite par le prince Antoine de Saxe (1755-1836) . Il fallut toute la pression de son père pour lui faire accepter finalement un prince susceptible d’arriver un jour au trône de Saxe ou à celui de Pologne d’autant qu’il s’agissait de continuer la suite des beaux mariages de ses sœurs et frère des années précédentes.

Les fêtes de départ furent particulièrement brillantes, on dit que la jeune fille toute émue à la cérémonie de mariage à Moncalieri se retourna vers ses parents au moment fatidique du oui, ce qui lui valut une injonction sévère et sonore de son père avec « un trois fois oui » qui fit rire toute l’assistance. Après un dernier salut au Saint Suaire puis à la dépouille d’Amédée IX à Vercelli, il fallut se séparer de la famille qui l’avait accompagnée jusque là et par Milan et Innsbruck on gagna la Saxe et Dresde où le mariage put avoir lieu le 24 octobre 1781. Le prince avait écrit gentiment à son beau père : »Il en coûtera sans doute à la sensibilité de Madame la princesse de s’éloigner de ses illustres parents et d’une famille qui doit lui être chère. Mais je mettrai tant d’attention à faire diversion à ses soucis et à l’attirer sa confiance et son estime que je me flatte de lui adoucir l’amertume de cette séparation… » .Il poursuivait d’ailleurs peu après : » « tous mes efforts ne tendront-ils qu’à me rendre digne des bontés d’une princesse qui réunit, aux charmes de la plus aimable figure , toutes les vertus de ses augustes parents… »

Tout parait aller au mieux d’autant que la jeune princesse reçoit l’aide du ministre Gabaléone Salmour d’Andezeno d’origine piémontaise qui a fait une brillante carrière politique à Dresde avec comme adjoint le comte savoyard Noyel de Bellegarde, c’est sur leur conseil qu’elle sympathise tout de suite avec sa nouvelle belle-sœur Amélie, que son beau-frère l’électeur Frédéric-Auguste épouse au printemps 1782 mais tout s’effondre en décembre lors de l’épidémie de variole qui frappe la cour et en particulier Caroline qui meurt subitement en décembre dans les mêmes conditions de souffrance et de regrets universels que son aïeule Marie-Adélaïde de Bourgogne 70 ans auparavant à Versailles.

Magnanimement, son mari rendit à son ex-beau père 320.000 livres sur les 420.00O données en dot et épousa en secondes noces en 1787 Marie-Thérèse d’Autriche ( 1767-1827), fille de l’impératrice et donc sœur de Marie-Antoinette de France et de Marie-Caroline de Naples. Il succéda à son frère sur le trône de Saxe en 1827 au moment même où il perdait sa seconde femme. Décidément le joli ménage de 1782 était destiné à ne connaître que des bonheurs éphémères.

142,143,144,145, 147, 152


 

146A/ MARIE-ANNE DE SAVOIE (1757- 1824)

duchesse de Chablais

fille de Victor-Amédée III et de Marie-Antoinette de Bourbon-Espagne (142)

mariage de résignation ou de raison, elle épouse en 1775 son oncle Benoit-Maurice duc de Chablais (1741-1808) . Ce prince assez terne n’avait pu marier avec sa cousine germaine Isabelle la fille du couple impérial de Vienne, on l’en consola avec un mariage guère plus « naturel » avec sa nièce portant bien plus jeune que lui.

Ce couple sans amour ni avenir mais non sans grâce s’était installé dès son mariage au palais du Chablais voisin du palais royal et au château d’Aglié dans le Canavese sauf durant la Révolution et l’Empire quand il fallut se réfugier en Sardaigne et à Rome où le prince mourut en 1808 ne s’étant fait connaître que par son rôle -modeste-durant la campagne piémontaise de 1795-96. Marie-Anne compléta son patrimoine en achetant en 1820 à Lucien Bonaparte la villa Ruffinella de Frascati avant de léguer le tout à son frère Charles-Félix.

Isolée et résignée elle eut toujours d’excellentes relations avec ses belles-sœurs Marie-Clotilde (145) Marie-Thérèse (147) et Marie-Christine ( 152)

142, 145, 147, 152.


147/ MARIE-THERESE DE MODENE–ESTE, ( 1773-1832) duchesse d’Aoste, reine de Sardaigne

« illusions et désillusions «

épouse du roi Victor-Emmanuel I°, belle-sœur des comtesses de Provence et d’Artois, (143 et 144) des reines Marie-Clotilde (145) et Marie- Christine( 151).

Née à Modène de Ferdinand-Charles ( Schoenbrunn 1754 - Vienne 1806) fils de l’impératrice Marie-Thérèse donc frère de Marie-Antoinette de France et Marie-Caroline de Naples, et de Marie-Béatrice Riciarda de Modène (fille du duc Ercole III de Modène et de Maria-Teresa de Malaspina, duchesse de Massa et de Carrare).

Marie-Thérèse appartient à une famille nombreuse car Ferdinand Charles a eu 10 enfants dont

cinq garçons ( Charles-Ambroise , primat de Hongrie en 1808, - François-Joseph duc de Modène 1779-1846 - Maximilien , 1782-1863, grand stratège et expert en art militaire, grand-maître de l’ordre teutonique en 1835- Ferdinand-Charles 1781-1860, gouverneur de Galicie de 1830 à 1845.

Cinq filles dont Marie-Béatrice ( 1787-1816, qui épouse l’empereur François I_en 1808 ( 1768-1835)

En avril 1789, dans le cadre du rapprochement austro-sarde, elle a épousé à Novare Victor-Emmanuel, duc d’Aoste (1759-1824), il a 20 ans de plus qu’elle, ni beau, ni intelligent, ni agréable……mariage éminement politique qui équilibre les mariages français des années 70 et qui inaugure la nouvelle tendance des Savoie pour les mariages Habsbourg .

En 1793, naissance de son premier enfant, Marie-Béatrice,( 148) certes on eut préféré un garçon. De 1794 à 1801, période triste où trois enfants meurent en bas âge et font désespérer de l’avenir….

En 1796, Hercule III, le grand père de Marie-Thérèse , est déposé par les Français, il meurt en 1803, laissant comme héritier et successeur (symbolique) son gendre, le père donc de Marie-Thérèse  

En 1799, alors que l’on pleure la mort du garçon né deux ans plus tôt et sur lequel on mettait l’espoir de la dynastie, il faut quitter Turin, on s’installe en Italie centrale avant de passer en Sardaigne puis d’en revenir en croyant à une amélioration de la situation politique de la péninsule, mais il faut rapidement se faire une raison sur une solitude et une pauvreté sans espoir . Moment d’autant plus triste qu’entre 1799 et 1802, le couple perd trois enfants (de la petite vérole, ce qui va susciter dorénavant chez Marie-Thérèse une hostilité systématique de la vaccination pour ses trois dernières filles…..

En 1802, son beau-frère Charles-Emmanuel très éprouvé par la mort de son épouse Marie-Clotilde de Bourbon (145) abdique, laissant la charge royale à Victor-Emmanuel, Marie-Thérèse devient donc reine mais dans de bien tristes conditions

1806, le père de la reine meurt, l’héritage (théorique) des Modène-Massa passe à son frère François-Joseph (1779-1846)/ Les menaces françaises sur Rome poussent le couple de Savoie à s’installer définitivement en Sardaigne

1808, sa sœur cadette Marie-Béatrice se marie avec l’empereur François dont elle est la troisième épouse, mais cette promotion ne fait guère avancer les atouts de la famille de Modène.

1812, désespérant sans doute de lui trouver un meilleur époux, la reine marie sa fille aînée Marie-Béatrice (148/ 1793-1840) avec son frère qui a quatorze ans de plus que sa nièce et épouse ( au même moment la reine accouche de sa quatrième fille)

1814, Les princes d’Ancien Régime retrouvent leurs domaines traditionnels, Marie Thérèse (revenue de Sardaigne sur le continent 9 mois après son mari) en Piémont et son frère à Modène, elle essaie de l’imposer comme successeur à son mari en mépris de la loi salique en fonction chez les Savoie, elle accueille donc fort mal le jeune prince Charles-Albert de Carignan mais elle ne peut l’emporter, son mari prenant la décision de rester fidèle à la tradition de la loi salique en Piémont.,

1817, elle est grand-mère car sa fille de Modène accouche de Marie-Thérèse, future comtesse de Chambord. Obstinée dans son conservatisme, elle fait renvoyer le comte Frédéric de Vallaise d’origine valdotaine, secrétaire d’Etat aux affaires extérieures partisan d’un relâchement de la politique royale de réaction ( il en mourra de dépit en 1823) . Faute d’avoir pu écarté Charles-Albert, elle essaie de lui faire épouser une de ses filles, ce que le jeune prince sentant le danger refuse, préférant choisir une princesse toscane ( 153) en fait habsbourg, ce que la souveraine ne pourra jamais lui pardonner……

Après la révolution de 1821 et l’abdication de Victor-Emmanuel, le couple royal s’établit à Nice, puis à Lucques et Modène et enfin en 1822 à Moncalieri où le roi meurt en janvier 1824.

1830, elle marie à Lucques sa fille Marie-Thérèse ( 150,/ 1803-1879) avec le prince Charles II de Bourbon-Parme

Février 1831, elle assiste à Milan au somptueux mariage de sa fille, Marie-Anne (149- 1803-1884), avec le prince héritier d’Autriche Ferdinand ( 1793-1875). Face aux bruits de Révolution, le jeune roi Charles-Albert devenu conservateur est très satisfait de cette union qui symbolise la nouvelle alliance entre l’empire Habsbourg et le royaume de Sardaigne., mais cela ne le réconcilie pas pour autant avec la reine et ses filles qui se souviennent avec amertume de la querelle successorale de 1814 et surtout de la « révolution » de 1821

1832, Marie-Thérèse meurt à Gênes …. c’est à ce moment que sa fille Marie-Christine (151-1812-1836), dernière d’une série malchanceuse, épouse, malgré elle, Ferdinand II de Naples (1810-1859)

143, 144, 145, 146, 148, 149, 150, 151, 152, 153

Festorazzi R. : la regina infelice, lettere di amore segrete di Maria Teresa di Savoia. Milan . 2002.


148/ MARIE-BEATRICE DE SAVOIE ( 1793-1840 ) duchesse de Modène , archiduchesse d’Autriche-Este

« un mauvais mariage »

Fille (aînée) de Marie-Thérèse (147) et de VIctor-Emmanuel I°,

En 1812, elle épouse (avec dispense pontificale) à Cagliari son oncle François-Joseph (1779-1846), duc théorique de Modène depuis 1806 et prince de fait seulement en 1814. Mariage de résignation ( l’époux avait envisagé de s’unir à sa cousine Marie-Louise avant les prétentions de Napoléon. néanmoins la jeune princesse avait la situation flatteuse d’être l’héritière du cardinal d’York (1725-1807) dernier représentant de la famille Stuart et de ses droits sur le Royaume Uni ( tout venant de la succession d’Henriette d’Angleterre mère de la reine Anne d’Orléans (135) et on ne pouvait manquer de notre l’homonymie avec Marie de Modène épouse en 1673 de Jacques II Stuart.

On dit que la jeune épouse révulsée par les perspectives des mariages consanguins refusa pendant quatre ans de consommer son mariage., pourtant elle semble s’en être remise puisqu’elle eut de 1817 à 1824 quatre enfants tous unis dans la même malchance dynastique : la plus célèbre fut Marie-Thérèse ( 1817-1886) -qui fut en 1846 l’épouse ( à la fois discrète et fidèle même si peu intelligente ) du comte de Chambord et qui de ce fait passe pour avoir été la dernière reine (théorique) de France. Dans le même genre des causes perdues signalons sa fille Marie-Béatrice, qui épousa Jean-Charles de Bourbon- Espagne successivement prétendant carliste au trône espagnol et dernier prétendant légitimiste en France, François V ( 1819-1875) réfugié en Autriche après 1859 et 13 ans de règne sans envergure n’ayant eu ni enfant ni héritier, son frère Ferdinand-Charles étant décédé à 28 ans après trois ans seulement de mariage….

En juillet 1813, Marie-Béatrice et son mari revinrent en Autriche (par Zante et Trieste) et un an après à Modène dont ils durent fuir devant l’offensive de Murat pendant les 100 jours de 1815 avant de repartir à nouveau en février 1831 suite aux troubles « prérisorgimentaux » d’Italie centrale.

Francesco se rendit célèbre par son refus de tout dialogue avec le courant libéral d’où une solide et constante persécution du mouvement carbonaro révolutionnaire et une profonde hostilité aux gouvernements qui les aidaient, d’où son refus obstiné (et unique en Europe) de ne pas reconnaître la monarchie d’Orléans.

La part de Marie-Béatrice dans cette politique est restée indubitablement faible mais fille de princes ultra-conservateurs, élevée dans un esprit notoirement réactionnaire, elle ne pouvait pas ne pas être elle-même très attachée à une mentalité antilibérale et anti révolutionnaire insensible même aux quelques progrès économiques de la plaine émiliénne à cette époque dont elle ne put profiter beaucoup puisqu’elle mourut finalement en 1840.

BINI M. : Gli Etsensi. La corte di Modena. Modène. 1999
BIANCHINI BRAGLIA E. : Maria Betrice Vitoria : Rivoluzione e Risorgimento tra Estensi e Savoia. Modène. 2004

149, 1150, 151,


149/ MARIE-ANNE-CAROLINE DE SAVOIE (1803-1884) impératrice d’Autriche

« les illusions d’un grand mariage «

née à Rome en 1803, Marie-Anne était la fille de Marie-Thérèse de Modène-Este (147) et de Victor-Emmanuel I° de Savoie, et la sœur jumelle de Marie-Thérèse de Bourbon-Parme (150)

En 1831 elle s’était mariée d’abord par procuration à Turin avec Ferdinand V (1793-1875) , fils de l’empereur François, alors simple roi de Hongrie avant un mariage plus concret à Vienne , le tout suivi assez rapidement en 1835 par le couronnement impérial à Vienne puis en 1836 par le couronnement royal à Prague et enfin en 1838 par un dernier couronnement royal à Milan. Jamais une princesse de Savoie n’était parvenu à un tel rang ( ce fut d’ailleurs la dernière fois que la cour habsbourg put s’offrir une telle série de couronnements)

Les évènements postérieurs firent vite oublier le luxe des cérémonies. Ferdinand était un débile, épileptique et impuissant, dangereux dans son incapacité même pour la monarchie après l’interminable vieillesse de l’empereur François, certes la faiblesse du souverain convenait bien aux ambitions des deux puissants ministres Metternich et Kolovrat mais à la condition ne pas devoir affronter de trop grandes crises aussi il semble bien que ce fut plus contre ces puissances que s’entendirent bientôt Marie-Anne et sa belle sœur Sophie plutôt que pour résoudre les faiblesses familiales des Habsbourg, ce qui explique la surprise de chacun lors de la révolte générale de l’empire au printemps 1848 largement explicable par tant de stagnation et de courte - vues.

On eut beau faire fuir la cour à Ollmutz er renvoyer enfin Metternich, il fallut se résoudre au pire c’est à dire à l’abdication de Ferdinand remplacé immédiatement par son neveu François-Joseph pour la plus grande joie de l’archiduchesse Sophie qui crut arriver ainsi au suprême pouvoir en contrôlant ainsi son fils maintenant sur le trône . Marie-Anne n’avait plus rien à espérer, elle se retira au château de Prague puis dans les environs de cette capitale À Ploshkowitch avec son mari que l’on oublia rapidement mais qui mit néanmoins près de trente ans pour mourir. Loin du monde tout en conservant son titre impérial, n’ayant plus comme plaisir que de brèves visites qui lui permettaient de parler encore italien et surtout piémontais, se consacrant à la prière et à la charité Marie-Anne survécut encore près de 10 ans à son mari pour s’éteindre à son tour dans la solitude en 1884, oubliée de tous , dernier membre vivant de la branche aînée des Savoie, dernière d’un monde disparu.

147,148, 150, 151


150/ MARIE-THERESE DE SAVOIE ( 1803-1879)

duchesse de Bourbon-Parme, princesse de Lucques, duchesse de Parme

« Quand on est mal parti »

Fille de Marie-Thérèse (147) et de Victor-Emmanuel I° ,

Enfant de l’exil, (elle est née à Rome en 18O3 avec une sœur jumelle Marie-Anne ) elle épouse à Turin en 1820 le duc Charles II de Bourbon-Parme (1799-1883), ex-roi d’Etrurie dépossédé en 1808, et pour le moment simple duc de Lucques.
Le mariage ne pouvait réussir d’abord du fait de la présence de la duchesse-mère Marie-Louise de Bourbon-Espagne, ex-reine d’Etrurie, devenue duchesse régente de Lucques en 1817, souveraine éclairée mais belle-mère autoritaire et déplaisante. En 1824, à la mort de cette dernière, Marie-Thérèse eut pu croire enfin à sa promotion mais il fallut compter alors avec le goût des voyages et des plaisirs de son mari qui se garda bien de lui laisser néanmoins quelque pouvoir que ce fut même en 1847 quand il put récupérer le duché voisin de Parme à la mort de l’ex-impératrice Marie-Louise ;, elle n’en profita guère encore car en 1848 la révolution obligea le duc à abdiquer au profit de son fils Charles III ( 1823-1854) . Veuve et retirée dans la villa « des plans » (Pianore) près de Lucques , elle subit encore la tragédie de l’assassinat de son fils suivi de peu par les troubles de 1860 qui aboutirent à la liquidation de la principauté intégrée au nouveau royaume d’Italie au profit donc de son « cousin »Victor-Emmanuel II qui eut la délicatesse de la laisser survivre dans la retraite et la solitude ( son mari l’ayant oubliée depuis longtemps) jusqu’à sa mort en 1879.

LUCARELLI G. : Lo sconcertante ducca di Lucca, Carlo Ludovico di Borbone Parma. Lucques. 1986.

CIFERRI E. : dizionario biografico degli Italiani. 2008.

SARDI C. : Il ducato di Lucca dal 1814 al 1849. Bologne. 2011.


151/ MARIE-CHRISTINE DE SAVOIE ( 1812-1836)

reine des Deux Siciles

Une pauvre femme

Dernière fille de Victor-Emmanuel I° et de Marie-Thérèse (147) , Marie-Christine épouse enfin à Gênes en 1832 Ferdinand II de Naples (1810-1859) tout juste arrivé sur le trône.

Après avoir hésité sur la possibilité d’une vie monastique, la princesse s’était décidée à ce mariage sous l’impulsion de sa mère puis de sa tante, la reine Marie-Christine veuve du roi Charles-Félix (152), Détestant Charles-Albert , elle voulait lui échapper au plus vite ce qui d’ailleurs arrangeait ce dernier désireux d’empêcher un lien éventuel entre les Bourbons de Naples et la Maison d’Orléans

Aussi blanche de peau que brune de chevelure, timide et réservée ( influencée à jamais par l’austérité de sa famille et de la cour de Turin) elle ne peut ni s’habituer ni se faire admettre par la cour de Naples et par son mari sinon auprès de sa belle-sœur Marie-Antoinette (1814-1898) qui dût hélas la quitter un an plus tard pour se marier au grand-duc de Toscane. Obsédée de piété et de rigueur ( allant même à régler les collants du corps de ballet de l’opéra San Carlo) elle ne semble pas avoir eu de vraies et profondes relations avec son mari si différent physiquement et psychologiquement. ( elle ne supportait ni ses excès caractériels , ni ses tentatives d’effusions, ni ses lourdes plaisanteries ou ses violences verbales « Je croyais avoir épousé le roi de Naples non un « lazzarone » ) Déjà malade et depuis longtemps angoissée sur l’attente d’un accouchement , elle met enfin au monde juste avant de mourir 15 jours après , un fils François 2 (1836-1894) qui sera le dernier roi de Naples (lui aussi victime comme ses oncles de ses « cousins » Carignan).

Ferdinand se remaria rapidement avec Marie-Thérèse de Habsbourg Teschen. ( décidément les Bourbon de Naples ne pouvaient se détacher de l’alliance habsbourg) qui, froide et réservée, ne put ni ne sut non plus jouer un rôle public efficace alors que Marie-Christine acquit très vite après sa mort une grande popularité dans la masse des fidèles napolitains d’où son surnom : « la reginella santa »

Dès 1859, le pape Pie IX introduisait une cause en béatification qui aboutit en 1937 à la proclamation de ses « vertus héroïques » , mais la pauvre princesse victime d’une continuelle malchance ne put obtenir davantage. Incontestablement pieuse et dévouée, elle n’a pu s’affranchir des hésitations historiques à son sujet, innocente et dépassée ? peu ou mal instruite ? mal comprise ? victime de personnes bornées ou fanatiques ? simpliste ? mal entourée ? mal comprise ? faute d’être elle-même interroger, Marie-Christine n’en finit pas de nous interroger….

152, 167, 173

REISET G.A. : Mes souvenirs , les débuts de l’indépendance italienne. 3 vol. Paris. 1901-1903.

REGOLO Luciano : La reginella santa- Tutto il racconta della vita di Maria Cristina di Savoia, sovrana delle Due Sicilie. Milan. 2000.

BALBIANO D’ARAMENGO M. Th :. Maria Cristina di Savoia. Studi Piémontesi. 2002 .173 p.

, 147, 148, 149, 150, 152

Les quatre filles de Victor-Emmanuel et de Marie-Thérèse ont connu ainsi des destinées aussi tristes que surprenantes puisqu’elles avaient paru avoir été amenées à des unions aussi prestigieuses que prometteuses mais aucune ne pt s’affranchir d’évolutions politiques et culturelles qui les dépassaient . Elles sont les tristes conséquences des choix de leurs parents incapables de comprendre les mutations irréversibles du monde post- révolutionnaire 


 

152/ MARIE-CHRISTINE DE BOURBON- NAPLES (1779-1849)

duchesse de Gênes, reine de Sardaigne

« De la vertu sinon de la gloire »

Fille du roi Ferdinand V des Deux-Siciles (1751- 1825) et de Marie-Caroline d’Autriche ( Marie-Christine est donc la nièce de Marie-Antoinette, reine de France)

Le seul événement marquant de sa jeunesse fut son voyage à Vienne en 1802 lorsque sa mère vint y implorer l’aide autrichienne ( qu’elle obtint plus officielle que réelle sans pouvoir la concrétiser avec un utile mariage habsbourg pour sa fille).

Elle avait donc épousé ( faute de mieux) en 1807 Charles-Félix ( 1765 -1831) duc de Genevois, frère (et héritier) du roi Victor-Emmanuel, bien plus âgé qu’elle et alors sans aucun espoir politique ou dynastique.

Elle était ainsi la belle-sœur de la reine Marie-Thérèse d’Este (147) et la sœur de Marie-Amélie (1782-1866, duchesse d’Orléans puis reine des Français après 1830), la sœur du roi Ferdinand I° de Naples, tante en même temps par ce dernier du roi Ferdinand II et par son beau-frère Victor-Emmanuel 1° tante de l’épouse de ce dernier Marie-Christine de Savoie (151) ),

Elle fut une épouse soumise et fidèle. Souffrant certainement de n’avoir pas eu d’enfant, elle n’en fut que plus liée à la reine Marie-Thérèse de Toscane (153)qui lui succéda et qui était aussi sa propre nièce ( le grand duc Ferdinand III de Toscane ayant épousé une autre sœur de la souveraine) .

Cette femme discrète et aimable, et unanimement reconnue comme telle, était aussi en excellente relation avec sa belle-sœur Marie-Anne, ( 146A/ 1757-1824) duchesse de Chablais qui, une fois veuve, s’était retirée à Rome et qui lui légua son château d’Aglié et sa villa de Frascati, toutes résidences qui lui furent particulièrement chères.

Une fois veuve, elle voyagea beaucoup entre Naples, Rome, Aglié et Hautecombe, essayant de rester en bonnes relations avec tous les autres membres de la Maison de Savoie qu’ils fussent de la branche aînée ou des Carignan jusqu’à sa mort survenue à Savone en 1849.

Comme son mari, elle se passionna pour la musique, pour le théâtre ( elle aida efficacement son mari pour le développement des théâtres de Gênes, de Nice et de Chambéry qu’il préférait aux établissements piémontais jugés trop libéraux ) et pour l’archéologie ( en particulier dans sa villa Tuscolana de Frascati)

Elle est surtout remarquable pour son œuvre à Hautecombe dont elle surveilla la fin de la restauration (avec le sculpteur Cacciatori) et l’aménagement de l’appartement royal. C’est d’ailleurs à Hautecombe qu’elle est enterrée aux côtés de son mari.

142, 151


153/ MARIE-THERESE DE HABSBOURG-TOSCANE (1801-1855) princesse de Carignan, reine de Sardaigne

« la tristesse de la vertu »

Fille du grand duc Ferdinand III de Toscane (1769-1824) et de Marie-Louise de Bourbon-Naples, nièce de l’empereur François d’Autriche, née à Vienne où ses parents s’étaient exilés, elle passa à Wurtzbourg ( principauté donnée en 1806 par Napoléon à son père en compensation de la perte de la Toscane ) une jeunesse ingrate du fait du décès de sa mère peu de temps après sa naissance. Elle revint à Florence en 1814.

Elle épouse en septembre 1817 le jeune prince Charles-Albert de Savoie-Carignan (1799-1849) et s’installe alors au palais Carignan . Altesse royal, elle pouvait s’enorgueillir d’une primauté d’honneur sur son mari seulement « altesse sérénissime ». Petite-fille de l’impératrice Marie-Thérèse, elle était donc la cousine germaine de la reine Marie-Thérèse de Modène-Este (147) qui la préférait à son mari jugé hypocrite et réservé.

En mai 1820 son premier fils, Victor-Emmanuel nouveau né manque mourir dans un incendie du palais. Elle joua certainement un grand rôle pour restaurer le crédit de son mari compromis dans le mouvement libéral de 1821, auprès du nouveau et très réactionnaire roi de Sardaigne Charles-Félix ( dont l’épouse- 152- était sa propre tante).

Fondamentalement généreuse et gentille, profondément pieuse Marie-Thérèse était obsédée par son souci des formes et du rang que l’âge ne cessa d’ailleurs d’aggraver en référence à une moralité et une pruderie qui faisaient la joie de la cour . Souveraine austère, plus mère qu’épouse, elle souffrit en silence des trahisons de son mari, ainsi que de son évolution politique ne pouvant admettre publiquement ses tendances libérales et « risorgimentales » ; elle se perdit alors dans une piété grave et triste, ce qui explique le refroidissement de ses relations avec son mari qui s’éloigna au Portugal en 1849 sans la prévenir ni l’emmener avec lui……

La mort de ce dernier et l’attitude de son fils et successeur ne firent qu’accroître sa raideur et sa solitude. . Dans un isolement austère, elle partagea dorénavant son temps entre Florence et Turin ( et plus précisément les châteaux de Racconigi et Moncalieri) ne fréquentant plus que sa belle-fille (et nièce ) Adélaïde (155) et son second fils le duc de Gênes considéré comme plus vertueux et donc plus fréquentable que son frivole et libéral frère Victor-Emmanuel. Elle mourut d’ailleurs en janvier 1855 presque en même temps qu’eux , rapprochement que l’opinion considéra comme un châtiment divin punissant l’accord « infernal » entre le roi Victor-Emmanuel et son ministre Cavour dont la reine détestai la politique religieuse ( Mgr Giovanni Tommaso Ghilardi composa un éloge funèbre commun pour les deux reines )

Vincenzo Vela lui a consacré une grande statue de marbre dans le sanctuaire turinois de la Consolata

VIGNOLI G. : I re e le regine della nostra storia. Pise. 2006.

147, 153, 154, 155, 166,


154/ MARIE-FRANCE-ELISABETH DE SAVOIE-CARIGNAN (1800- 1856) , archiduchesse d’Autriche, vice reine de Lombardie Vénétie

« les ambiguités des branches cadettes «

fille de Charles-Emmanuel de Savoie-Carignan et de Marie-Albertine de Saxe (133) sœur du roi Charles-Albert,

Elevée par sa mère restée veuve au moment même de sa naissance, elle se voit après 1814 emmenée par celle-ci en Autriche et en Saxe en dépit des protestations du roi Victor-Emmanuel I° qui entend l’installer à Turin à côté de son frère.

Or on commence à causer de plus en plus dans les cours européennes du cas de l’archiduc Rainier de Habsbourg (1783- 1853) fils de l’empereur Léopold alors grand-duc de Toscane frère de l’empereur François et du duc Ferdinand III de Toscane donc beau-frère de la reine Marie-Thérèse de Modène-Este (147) et oncle de la reine Marie-Thérèse de Toscane (153) ). Il avait été nommé vice-roi de Lombardie-Vénétie en 1818. Ses amis le considéraient comme affable et intelligent alors que ses ennemis dénonçaient son avarice et son esprit assez borné, de toutes les façons ce n’était pas une charge facile d’où la nécessité de le marier d’autant qu’il en avait de plus en plus envie ce qui faisait dire à Metternich qu’il était prêt même à « épouser un canapé. «

Pourquoi ne pas le marier avec la jeune Elisabeth poussée par sa famille de Saxe toute contente de trouver là un moyen pour sortir de l’ isolement où l’avait poussée le congrès de Vienne furieux de son alliance et de sa fidélité à Napoléon ?. Encore fallut-il éloigner bien des prétendants , comme l’ex-roi d’ Etrurie, son cousin Lobkowitz ou même le roi Guillaume de Wurtemberg veuf d’une sœur du tsar, mais très vite écarté par Metternich pour son indépendance d’esprit et soi disant pour son protestantisme irréductible ( au grand regret d’Elisabeth qui l’avait tout de suite apprécié). Le mariage eut donc lieu à Prague en 1820 (symboliquement placée entre Vienne et Dresde) en l’absence remarquée de sa mère ( très déçue de ne pas voir sa fille monter sur un vrai trône royal, mais on calma vite sa réticence par l’octroi d’un titre princier autrichien à son mari ). Son frère Charles-Albert , lui aussi absent, qui pourtant ne la connaissant pas, eut pu trouver là un bon moyen de renouer des liens avec elle, mais pour le moment très lié aux carbonari très antiautrichiens il ne pouvait apparaître trop servile envers la puissance occupante de l’Italie. Enfin le roi Victor-Emmanuel, qui plus en plus autoritaire ne pouvait supporter les initiatives qui lui échappaient, s’était tout de suite déclaré, lui aussi ,absent. Metternich rapporte dans ses Mémoires : « Le mariage de l’archiduc avec la princesse de Carignan a eu lieu aujourdhui . La fiancée est merveilleusement belle , elle a une demi tête de plus que moi , ce qui ne l’empêche pas d’avoir une jolie tournure. La tête a une expression de noblesse remarquable, elle a des yeux longs et langoureux , le nez petit et finement découpé. Sa bouche est bien faite et cache les plus belle dents que j’ai jamais vues et pourtant malgré toutes ces perfections extérieures ,je trouve qu’une aussi grande dame manque de charme…. »

L’installation du jeune couple à Milan fut à la fois solennelle mais perdue dans l’actualité des premiers sursauts libéraux en Italie du sud puis des révolutions qui suivirent ( en particulier à Turin, où Charles-Albert fut sévèrement compromis), des congrès internationaux des gouvernements européens à Laybach et à Vérone . En mars 1821, dans la crainte d’une révolution à Milan, le vice-roi se retire avec son épouse à Brescia mais la situation se rétablit et l’on put croire à la possibilité d’une période de tranquillité. Le couple vice-royal a cinq enfants de 1821 à 1827 et se passionne pour les sociétés savantes, pour la musique et pour les spectacles de la Scala, alternant la vie simple de la villa du Pizzo (sur le lac de Côme) avec les incessantes cérémonies organisées pour les illustres visiteurs de passage à Milan à moins que ce ne fut pour eux mêmes dans leurs voyages réguliers à Venise et dans les autres métropoles d’Italie du nord. Certes tout cela se déroule dans un arrière-fond de conspirations et de répression où le vice-roi alterne la générosité (ainsi envers le comte Confalonieri en 1821) et la sévérité (ainsi son indifférence envers Sivio Pellico ou même son opposition aux amnisties du gouvernement viennois jugé bien trop généreux)… . Elisabeth ne peut aussi que se réjouir du rapprochement austro-sarde surtout après 1830 qui lui permet de retrouver enfin son frère avec lequel elle n’avait jamais eu beaucoup de relations depuis sa jeunesse. En 1835 la célébration solennelle du mariage du nouvel empereur Ferdinand avec Anne de Savoie (149), fille de Victor-Emmanuel parut marquer la réconciliation de la famille de Savoie avec Elisabeth qui joua un rôle parfait de maîtresse de maison et d’organisatrice des cérémonies, enfin l’entente fut solennellement consacrée à Turin en 1842 par le mariage de la jeune Adélaïde (155) fille du couple du vice-roi avec son cousin germain Victor-Emmanuel.

Cependant les temps changeaient rapidement, la vice-reine eut à subir des affronts de plus en plus nombreux de la part de la noblesse lombarde, les témoignages la montrent alternant l’amabilité et la grâce mais aussi l’intransigeance et la raideur. L’inquiétude de janvier 1848 devient affolement en mars à la nouvelle de la révolution de Vienne conjointe à celle de Milan. Le couple se retire avec ses enfants à Brescia, Lodi, Mantoue et enfin au Tyrol sans comprendre les causes d’un tel drame ni celle de la « trahison » de Charles Albert devenu l’ennemi juré du royaume lombard-vénitien. On se fixe enfin tristement à Bolzano symboliquement bien situé à la frontière des mondes germanique et italien, c’est là que Ranieri meurt en janvier 1853 ( sa fille Adélaïde (155) devenue reine de Sardaigne, arriva trop tard à la cérémonie) début d’une série de catastrophes pour la pauvre Elisabeth avec les morts successives en deux ans de son frère, de sa mère et enfin de sa fille. Il ne lui resta plus qu’à mourir elle-même le jour de Noël 1856 et c’est presque dans l’indifférence générale ( même de sa propre famille) qu’elle fut enterrée à Trente. Il n’est pas bon de se trouver à la charnière d’époques aussi radicalement différentes (et encore eut-elle la chance de ne pas assister à la disparition en 1859 de cet Etat lombardo-vénitien auquel elle avait cru se consacrer…

133 , 153, 155


155/ MARIA-ADELAIDE DE HABSBOURG (1822-1855)

princesse de Piémont, reine de Sardaigne

« la malchance de la vertu »

Fille de Marie-Elisabeth de Savoie-Carignan (154-1800-1856, sœur du roi Charles-Albert) et de l’archiduc Rainier de Hasbourg, vice-roi du royaume de Lombardie-Venétie ( 1783-1853)

Elle épouse en 1842 à Stupinigi son cousin germain Victor-Emmanuel II (1820-1878) . Le prince eut préféré Marie-Caroline sœur aînée de la jeune fille mais pour une fois la reine Marie-Thérèse imposa son choix même au roi Charles-Albert qui ne put que retarder de deux ans la cérémonie nuptiale où la princesse apporta une dot de 200.000 florins. Discrète et soumise, cultivée et aimable Adelaïde ( « Suzi » ou « Suzette » comme l’appelait son mari ) ne joue aucun rôle politique ni même mondain, s’enfermant dans la discrétion et la réserve face aux excès sexuels de son mari (et en particulier face à la relation de celui-ci avec la belle Rosine) se contentant de mettre au monde huit enfants (dont quatre survécurent Clotilde (156) , Humbert, Amédée et Maria Pia -157- ) . Cependant en 1851, le bruit « invraisemblable » (mais significatif ) se répandit dans Turin d’une conspiration unissant les reines ( Marie-Thérèse et Marie-Adélaïde, le duc de Gènes et le cousin de Carignan-VillaFranca pour forcer le roi à renoncer au Statuto ou démissionner en cas d’opposition. Bien entendu il n’en fut rien mais il n’empêche que la rumeur atteignit la chambre des députés où Cavour dut mettre les choses au point….

Très tôt malade, affaiblie elle meurt d’une gastroentérite dans une agonie aussi courte que terrible en janvier 1855 dans une même série rapide et tragique qui fit disparaître en peu temps, son père, sa belle- mère et son beau- frère Ferdinand, où l’opposition conservatrice voulut voir la main de Dieu punissant le couple Victor-Emmanuel II - Cavour jugé antireligieux car anticlérical et de plus en plus anti-romain. Le roi ébranlé ne retrouva ses esprits que sur la pression de son ministre qui se chargea bien de lui faire oublier une épouse aussi « pâle » en satisfaisant ses énormes appétits sexuels et surtout en favorisant sa relation avec la « belle Rosine » Vercellana qu’il épousa morganatiquement en 1869 (158) .

Le sculpteur Vincenszo Vela consacra à la basilique de la Consolata une statue de la jeune défunte aux côtés de celle de sa belle-mère .

154, 156,157,158, 159, 168,


156/ CLOTILDE DE SAVOIE (1843-1911) princesse Bonaparte

soumise et décidée

Fille de Victor-Emmanuel II et de Adélaïde de Habsbourg (155) , elle perd sa mère à l’âge de 12 ans ce qui ne fera que renforcer son caractère introvertie et sa préférence pour une vie toute intérieure

Elle épouse en janvier 1859 le prince Jérôme Napoléon (1822 -1891), fils de l’ancien roi Jérôme, donc le neveu de Napoléon I° et le cousin germain de Napoléon III, prince Napoléon, dit familièrement « Plon- plon » et déclaré plus tard, comte de Moncalieri. Cette union purement politique avait été envisagée par Cavour et Napoléon III lors de l’entrevue de Plombières dans l’été 1858 et à laquelle Victor-Emmanuel dut se résigner, l’empereur lui se déclarant ravi de forcer enfin une ancienne maison royale à se rapprocher de sa famille.
Alors que Clotilde est une personne aussi effacée que discrète, ne trouvant d’épanouissement que dans une foi inébranlable et sentimentale, face à un Jérôme cynique, brutal, très anticlérical, ( n’est-il pas franc-maçon et membre influent et remarqué du Grand Orient ? ). Jamais couple n’a été plus mal assorti et finalement peu de témoins crurent à sa durée au moment du mariage et pourtant, même  sans s’être connus avant leur union, les deux époux ( pourtant séparés par près d’une vingtaine d’années de différence d’âge) sont arrivés néanmoins à un certain modus vivendi

On s’installe au palais royal de Paris dans l’ancienne aile Montpensier, le bâtiment a été ravagé en 1848 et son réaménagement est confié à Clotilde qui se révèle une parfaite décoratrice d’où une agréable résidence (avec une chapelle bien sûr) qui deviendra plus tard le siège du conseil constitutionnel de l’Etat français
En 1861, le prince emmène sa jeune épouse faire un croisière tout autour de la Méditerranée occidentale qui se termine fort agréablement au Portugal où contre toute attente, Clotilde décide de ne pas retourner immédiatement en France et d’accompagner son mari qui part visiter le président Lincoln et examiner la situation des Etats-Unis ( sans oublier la famille américaine de son père) . C’est la première fois qu’un membre de la famille de Savoie traverse l’Atlantique et la jeune princesse découvre durant l’été 1861 et non sans surprise ce pays en pleine guerre civile et si différent de tout ce qu’elle a pu connaître jusqu’alors sans perdre son calme et sa piété. Cependant en 1863, un nouveau voyage en Egypte et en Palestine lui laissa certainement plus d’impressions et d’émotions

Mais il faut revenir à Paris et reprendre cette curieuse vie quotidienne de cohabitation polie entre deux époux aussi différents ayant chacun une vie bien particulière, lui tout en gestes et propos politiques et elle tout en piété solitaire et austère, ce qui n’empêche pas trois enfants de venir égayer bientôt un ensemble qui en avait bien besoin : Napoléon-Victor ( 1862-1926, le futur prince Victor) , Luis ( 1864-1932) et Laetitia (169/ 1866-1926) qui épousera son oncle Amédée d’Aoste (1845-1890) .

La piété de Clotilde entiérement tournée vers le culte eucharistique et vers le Sacré Cœur ne cessait de détoner dans l’atmosphère brillante de la cour même si l’impératrice se voulait elle aussi très religieuse mais dans un genre moins austère, moins discret et plus politique. Les deux femmes, l’une espagnole et l’autre italienne, ne s’appréciaient guère et eurent du mal à s‘entendre, même si elles partageaient la même inquiétude sur le sort du souverain pontife menacé par l’unité italienne. Clotilde est bien sûr ( plus ou moins ) gentiment moquée par les uns et admirée par d’autres ( même par Renan et par son impérial cousin )

En septembre 1870, elle quitte Paris sans difficulté et même avec les honneurs , en août son père lui avait déjà conseillé de revenir en Italie mais elle n’avait pas voulu paraître trop apeurée «  Peur et Savoie ne sont pas dans le même champ ». Elle se réfugie à Prangins près de Genève avec ses enfants d’autant plus seule que son mari rejoint bientôt Paris pour y reprendre un rôle politique. Elle se lie alors de plus en plus à son nouveau chapelain, le père dominicain Hyacinthe Cormier qui la détermine à entrer dans le Tiers-Ordre dominicain sous le nom de Soeur Catherine

Mêlant non sans difficulté un intense amour filial et une ferme opposition à la politique et à la vie sentimentale de son père (auquel elle écrivait « Le jour ultime arrivera pour chacun et alors les choses se montreront clairement, tu n’es pas préparé, papa, à des remords douloureux et terribles » et qu’elle manifeste en ne revenant en Italie qu’en 1878, à la mort de son père. Elle s’établit alors à Moncalieri ne fréquentant qu’épisodiquement Turin et Rome et continuant sans faiblir sa vie de piété et de charité.

Certes elle a bien quelques bonheurs, c’est elle qui est en effet à l’origine du mariage de ses enfants ( Victor épousant d’amour Clémentine de Belgique et Laetitia son oncle Amédée d’Aoste qu’elle ne veut pas voir sombrer dans la solitude après le décès de sa première épouse ), elle considérera aussi comme une grande victoire le fait d’amener un prêtre au chevet de son mari mourant en 1891) cependant elle doit aussi résister à bien des épreuves ainsi après 1879 ( à la mort du prince impérial fils de Napoléon III) la rupture entre le prince Jérôme et son fils Victor pour la direction du mouvement bonapartiste en France,la vie dissolue de sa fille et surtout l’assassinat de son frère Humbert en 1900.

Elle n’avait conservé de relations qu’avec sa belle-sœur la duchesse Maria Vittoria d’Aoste ( 168) et avec sa sœur Maria Pia de Portugal (157) . Elle n’eut de joie qu’en 1910 avec le mariage de son fils Victor avec Clémentine de Belgique qui avait dû attendre   la mort du roi des Belges obstinément hostile à ce projet, il était temps car l’année suivante en 1911 Clotilde s’éteignit dans la solitude presque oubliée de tous. Ses funérailles furent célébrées à la Gran Madre di Dio de Turin avant son inhumation à la Superga.

Très vite, l’opinion l’avait dénommée « la sainte de Moncalieri » aussi en 1942, on entama au Vatican une cause de béatification qui semble pourtant oubliée actuellement .

BROSIO V, "Due Principesse fra Torino e Parigi", , Torino, 1978 (biographie de Clotilde et de sa fille Letitia Bonaparte).

ROERO DI CORTANZE C.  : « Il matrimonio della principessa Clotilda di Savoia nelle memorie di un gentiluomo piemontese » /Rome, 1938, 680 p.

155, 158, 159,, 168, 169


157/ MARIA PIA DE SAVOIE ( 1847- 1911)

reine de Portugal

« on n’échappe pas à la Révolution »

fille de Victor-Emmanuel et d’Adélaïde, (155)elle aussi souffrit de la mort de sa mère en 1855 puis de la vie volage de son père avant de voir partir à Paris sa sœur Clotilde en 1859 ( 156) .

Elle épouse en 1862 Louis I° de Bragance, roi de Portugal (1838-1889) qui vient d’arriver au trône à la suite de la mort de son frère et prédécesseur et qui refuse en 1868, la couronne d’Espagne proposée de ce fait à son beau-frère Victor-Amédée d’Aoste.

elle a eu deux enfants, Charles I° (1863- 1908) et Alphonse de Por tugal, duc de Porto

Populaire pour ses œuvres de charité mais aussi très connue pour son goût du faste et des fêtes, elle eut une triste fin puisqu’elle perdit presque en même temps en 1889 son mari et son frère Victor- Amédée d’Aoste puis en 1900 son frère Humbert juste avant de voir en 1908 son fils le roi Charles et son petit fils, le prince royal Louis-Philippe assassinés par un terroriste , double meurtre qui compromit sa santé mentale et qui accéléra la chute de la monarchie portugaise en 1910. Réfugiée en Piémont, elle mourut en 1911 au moment même où était proclamée la République portugaise et où mourait sa sœur Clotilde. Inhumée à la Superga , elle est la seule reine du Portugal à ne pas être enterrée au panthéon des Bragance en l’église saint Vincent de Fora à Lisbonne

155, 156, 159 ; 168