Aller au contenu

137bis – ANNA-CARLOTTA-TERESA, MARQUISE DE SPIGNO (1680-1769)

137bis - ANNA CARLOTTA TERESA, MARQUISE DE SPIGNO, (1680-1769) COMTESSE DE SAN SEBASTIANO….

Epouse morganatique du roi Victor-Amédée.

« Courtisée ou courtisane ? «

137 marquise de spigno
La Marquise de Spigno, enfin un bonheur certain mais bien court.

Curieux destin que celui de Anna Carlotta Teresa fille de Francesco Maurio du Canalis di Cuminana et de Francesca di San Martino d’Aglio. Belle, vive, active, tout paraît réussir à cette brillante héritière qui passe à 20 ans au service de Madame Royale ( 105/ Marie-Jeanne Baptiste) mère du duc Victor dont elle semble être devenue la favorite….

Nouvelle étape en 1703 quand la vieille duchesse-mère lui organise son mariage avec son écuyer Ignazio Novarina , comte de San Sebastiano , parvenu assez grossier ( son comté était trop récent pour être remarquable) qui ne semble pas pour autant avoir été un mauvais mari et qui en tous les cas lui donna sept enfants.

En 1723, nouvelle étape dans la vie de la dame, son mari meurt au moment même où elle passe au service de Polyxène de Hesse la belle-fille du roi (139) , ce qui la rapproche encore davantage de ce dernier et ce qui explique la faveur de celui-ci d’autant qu’il s’éloigne toujours davantage de son épouse, Anne d’Orléans qui a la bonne idée de mourir en 1728. Le temps officiel du deuil étant passé, le roi s’empresse de l’épouser discrètement ( mais non secrètement) en juillet 1730 au moment même où soucieux d’une nouvelle vie et de vivre sa passion il se décide à abdiquer ( à l’instigation de son ancêtre Amédée VIII) . Dernier acte de son pouvoir, le roi Victor attribue à sa nouvelle épouse le titre de Comtesse de Spigno ( une seigneurie du Montferrat) et le couple royal se retire à Chambéry , bien décidé à profiter de la vie mais il en eût fallut bien davantage pour trouver le repos d’une retraite pourtant bien méritée…

Certes l’ex-souverain est bien plus âgé que sa femme ( 14 ans) mais en soi l’écart n’était pas si extraordinaire d’autant que la nouvelle marquise avait déjà eu l’habitude d’une telle différence. En fait chasser le naturel le fait revenir au galop et un homme aussi actif et énervé que Victor ne pouvait se contenter d’une vie recluse et provinciale d’où des interventions de plus en plus pressantes auprès de son fils et successeur auquel il n’arrive pas à accorder sa confiance.

On connaît la crise finale, le « vieux » souverain revenant en août 1731 sur son abdication et prétendant reprendre le pouvoir, d’où son arrestation le mois suivant , son transfert à Rivoli et l’année suivante à Moncalieri où il disparaît dans la colère et la fureur. On avait d’abord séparé le couple et conduit la « princesse » à Ceva avant de la ramener à son époux à Rivoli en décembre 1731. A la mort de celui-ci , on la conduisit à la Visitation de Pignerol où elle végéta tristement jusque dans un âge avancé puisqu’elle n’y mourut qu’en 1769 à 89 ans , la seule vraie joie dont elle put bénéficier encore fut la célébrité de son fils Paolo Federico héros de la bataille de l’Assiette contre les Français en 1747.

Bien sûr, tout cela peut-être considéré comme une histoire secondaire mais les questions ne manquent pas. Comment considérer son rôle ? fut-elle une courtisane qui s’ingénia à attirer un souverain toujours sensible au « beau sexe » ou au contraire est-ce lui qui n’eut de cesse de capter son attention ? ( on rapporta même que Marie-Jeanne Baptiste fut l’instigatrice de son mariage en 1703 pour la faire échapper aux manœuvres amoureuses de son fils ) mais surtout quel fut son rôle lors de la crise finale ? est-ce qu’elle contribua à l’ultime ambition du roi (comme le prétendit Mgr Gattinara, archevêque de Turin lors d’un débat du conseil royal en 1732 ) ou en fut-elle le témoin impuissant ? le mystère ou du moins le débat demeure : on ne fréquente pas impunément certaines grandes personnalités !

DE AMICIS E. : Alle porte d’Italia. Turin. 1899. 406 p.

BIANCOTTI A. : La regina di un re, la vita della marchesa di Spigna . Turin. 1940. 338 p.

GONTIER M. : Una carrozza per Pinerolo . Biografia della marchesa di Spigno .Pignerol..1995. 216 p. :