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156 – CLOTILDE DE SAVOIE (1843-1911)

156 - CLOTILDE DE SAVOIE (1843-1911) princesse Bonaparte

soumise et décidée

Clotilde de Savoie, Princesse Bonaparte, elle aussi victime de la politique. Sauvée néanmoins par sa vertu.
Clotilde de Savoie, Princesse Bonaparte, elle aussi victime de la politique. Sauvée néanmoins par sa vertu.

Fille de Victor-Emmanuel II et de Adélaïde de Habsbourg (155) , elle perd sa mère à l’âge de 12 ans ce qui ne fera que renforcer son caractère introvertie et sa préférence pour une vie toute intérieure

Elle épouse en janvier 1859 le prince Jérôme Napoléon (1822-1891), fils de l’ancien roi Jérôme, donc le neveu de Napoléon I° et le cousin germain de Napoléon III, prince Napoléon, dit familièrement « Plon- plon » et déclaré plus tard, comte de Moncalieri. Cette union purement politique avait été envisagée par Cavour et Napoléon III lors de l’entrevue de Plombières dans l’été 1858 et à laquelle Victor-Emmanuel dut se résigner, l’empereur lui se déclarant ravi de forcer enfin une ancienne maison royale à se rapprocher de sa famille.
Alors que Clotilde est une personne aussi effacée que discrète, ne trouvant d’épanouissement que dans une foi inébranlable et sentimentale, face à un Jérôme cynique, brutal, très anticlérical, ( n’est-il pas franc-maçon et membre influent et remarqué du Grand Orient ? ). Jamais couple n’a été plus mal assorti et finalement peu de témoins crurent à sa durée au moment du mariage et pourtant, même  sans s’être connus avant leur union, les deux époux (pourtant séparés par près d’une vingtaine d’années de différence d’âge) sont arrivés néanmoins à un certain modus vivendi.

On s’installe au palais royal de Paris dans l’ancienne aile Montpensier, le bâtiment a été ravagé en 1848 et son réaménagement est confié à Clotilde qui se révèle une parfaite décoratrice d’où une agréable résidence (avec une chapelle bien sûr) qui deviendra plus tard le siège du conseil constitutionnel de l’Etat français. En 1861, le prince emmène sa jeune épouse faire un croisière tout autour de la Méditerranée occidentale qui se termine fort agréablement au Portugal où contre toute attente, Clotilde décide de ne pas retourner immédiatement en France et d’accompagner son mari qui part visiter le président Lincoln et examiner la situation des Etats-Unis (sans oublier la famille américaine de son père). C’est la première fois qu’un membre de la famille de Savoie traverse l’Atlantique et la jeune princesse découvre durant l’été 1861 et non sans surprise ce pays en pleine guerre civile et si différent de tout ce qu’elle a pu connaître jusqu’alors sans perdre son calme et sa piété. Cependant en 1863, un nouveau voyage en Egypte et en Palestine lui laissa certainement plus d’impressions et d’émotions.

Mais il faut revenir à Paris et reprendre cette curieuse vie quotidienne de cohabitation polie entre deux époux aussi différents ayant chacun une vie bien particulière, lui tout en gestes et propos politiques et elle tout en piété solitaire et austère, ce qui n’empêche pas trois enfants de venir égayer bientôt un ensemble qui en avait bien besoin : Napoléon-Victor (1862-1926, le futur prince Victor), Luis (1864-1932) et Laetitia (169/ 1866-1926) qui épousera son oncle Amédée d’Aoste(1845-1890) .

La piété de Clotilde entiérement tournée vers le culte eucharistique et vers le Sacré Cœur ne cessait de détoner dans l’atmosphère brillante de la cour même si l’impératrice se voulait elle aussi très religieuse mais dans un genre moins austère, moins discret et plus politique. Les deux femmes, l’une espagnole et l’autre italienne, ne s’appréciaient guère et eurent du mal à s‘entendre, même si elles partageaient la même inquiétude sur le sort du souverain pontife menacé par l’unité italienne. Clotilde est bien sûr (plus ou moins) gentiment moquée par les uns et admirée par d’autres ( même par Renan et par son impérial cousin).

En septembre 1870, elle quitte Paris sans difficulté et même avec les honneurs , en août son père lui avait déjà conseillé de revenir en Italie mais elle n’avait pas voulu paraître trop apeurée «  Peur et Savoie ne sont pas dans le même champ ». Elle se réfugie à Prangins près de Genève avec ses enfants d’autant plus seule que son mari rejoint bientôt Paris pour y reprendre un rôle politique. Elle se lie alors de plus en plus à son nouveau chapelain, le père dominicain Hyacinthe Cormier qui la détermine à entrer dans le Tiers-Ordre dominicain sous le nom de Soeur Catherine

Mêlant non sans difficulté un intense amour filial et une ferme opposition à la politique et à la vie sentimentale de son père (auquel elle écrivait « Le jour ultime arrivera pour chacun et alors les choses se montreront clairement, tu n’es pas préparé, papa, à des remords douloureux et terribles » et qu’elle manifeste en ne revenant en Italie qu’en 1878, à la mort de son père. Elle s’établit alors à Moncalieri ne fréquentant qu’épisodiquement Turin et Rome et continuant sans faiblir sa vie de piété et de charité.

Certes elle a bien quelques bonheurs, c’est elle qui est en effet à l’origine du mariage de ses enfants ( Victor épousant d’amour Clémentine de Belgique et Laetitia son oncle Amédée d’Aoste qu’elle ne veut pas voir sombrer dans la solitude après le décès de sa première épouse ), elle considérera aussi comme une grande victoire le fait d’amener un prêtre au chevet de son mari mourant en 1891) cependant elle doit aussi résister à bien des épreuves ainsi après 1879 ( à la mort du prince impérial fils de Napoléon III) la rupture entre le prince Jérôme et son fils Victor pour la direction du mouvement bonapartiste en France,la vie dissolue de sa fille et surtout l’assassinat de son frère Humbert en 1900.

Elle n’avait conservé de relations qu’avec sa belle-sœur la duchesse Maria Vittoria d’Aoste ( 168) et avec sa sœur Maria Pia de Portugal (157) . Elle n’eut de joie qu’en 1910 avec le mariage de son fils Victor avec Clémentine de Belgique qui avait dû attendre   la mort du roi des Belges obstinément hostile à ce projet, il était temps car l’année suivante en 1911 Clotilde s’éteignit dans la solitude presque oubliée de tous. Ses funérailles furent célébrées à la Gran Madre di Dio de Turin avant son inhumation à la Superga.

Très vite, l’opinion l’avait dénommée « la sainte de Moncalieri » aussi en 1942, on entama au Vatican une cause de béatification qui semble pourtant oubliée actuellement .


 

BROSIO V, "Due Principesse fra Torino e Parigi", , Torino, 1978 (biographie de Clotilde et de sa fille Letitia Bonaparte).

ROERO DI CORTANZE C.  : « Il matrimonio della principessa Clotilda di Savoia nelle memorie di un gentiluomo piemontese » /Rome, 1938, 680 p.

155, 158, 159,, 168, 169