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165 – MARIE-JOSE DE SAXE-COBOURG-GOTHA (1906-2001)

165 - MARIE-JOSE DE SAXE-COBOURG-GOTHA - BELGIQUE (1906-2001)

Dernière reine d’Italie

« L’art de résister à la malchance «

165 marie José
La dernière Reine d'Italie, modernité libéralisme et intelligence.

Fille du roi Charles-Albert, grande figure de la défense de la Flandre durant la première guerre mondiale (1875-1934) et de la reine Elisabeth, née Wittelsbach de Bavière ; elle-même, nièce de l’impératrice Sissi aussi célèbre par son énergie que par son talent musical (1876-1965), dont elle hérita de la vivacité et d’un amour passionné de la liberté d’abord mais aussi des arts et des lettres.

Née à Ostende, elle a été préparée à connaître la Maison d’Italie par une lointaine cousine de sa mère, Isabelle de Bavière (167) (1863-1924) qui avait épousé en 1883 Thomas de Savoie-Gènes le frère de la reine Marguerite, donc tante par alliance du roi Victor-Emmanuel III. 

Marie José de Belgique et son marie Humbert, lors de leur mariage en 1930. Deux jeunes époux beaux et modernes, la famille royale se veut encore pleine d'espoirs.

En janvier 1930, la gracieuse fille du roi des Belges, épousait solennellement à Rome, le jeune et beau Humbert, prince du Piémont et prince héritier du royaume d'Italie. On s'interrogea beaucoup à l'époque sur l'aspect forcé du mariage, mais au delà des ors et des honneurs, l'événement révélait la volonté de la famille de Savoie de garder des liens avec ses alliés de la Grande Guerre et en particulier avec une famille royale réputée par son respect des règles démocratiques et son goût de la modernité. Réconciliés de fait avec le pape depuis le traité du Latran signé un an plus tôt, les Savoie n'avaient plus à chercher des épouses hors des grandes dynasties catholiques et entendaient bien montrer ainsi à l'opinion que leur alliance avec Mussolini n'était que de circonstances. On n’en chuchotait pas moins sur le plaisir du roi Victor de renouer avec la reine Elisabeth qu’il avait secrètement admirée (aimée ?) autrefois.

Même si très rapidement, elle ne se fait aucune illusion sur la cour de Rome (qui parle de « la négresse blonde » et sur la fidélité de son mari, Marie José n’en assure pas moins avec grand sérieux son « métier » de princesse héritière et d’épouse successivement établie à Turin, à Naples puis à Rome. C’est ainsi qu’en dépit de toutes les difficultés, elle eut quatre enfants : Maria-Pia (née en 1934, épouse d’Alexandre de Yougoslavie puis de Michel de Bourbon-Parme), Victor-Emmanuel (né en 1937, époux de Marina Doria, actuel prétendant au trône d’Italie), Marie-Gabrielle (née en 1940, épouse divorcée de Robert de Balkany) et enfin Marie-Béatrice (née en 1943 qui épousa Luis Corvalan y Dillon).

Baptême de la princesse Marie-Béatrice de Savoie au Vatican, en 1943
Baptême de la princesse Marie-Béatrice de Savoie au Vatican, en 1943. Les enfants du prince et de la princesse de Piémont paraissent donner une garantie d'avenir à la famille de Savoie.

Politiquement la situation était encore pire, le régime devenait de plus en plus fasciste en dépit de l'hostilité manifeste du jeune ménage princier au Duce qui se défendait par un chantage certain sur la vie privée assez mouvementée et scandaleuse d'Humbert, au point que certains n’hésitaient pas à conseiller à la princesse d’en profiter pour rompre une union aussi mal assortie, ce qu’elle refusa hautement et ce qui lui donna le lustre d'une jeune femme démocrate et héroïque dans son isolement matrimonial et politique. En effet ce qui n’était que réticence au début, devint rapidement dès 1936 une opposition ouverte à Mussolini réduisant la vie quotidienne de la jeune femme à une série d’incidents et d’insolences (reçus ou donnés) qui devinrent infernaux après 1939 et bien sûr après 1940 avec l’entrée en guerre de l’Italie aux côtés d’Hitler au moment où ce dernier écrasait la Belgique. Au début, chacun fit face avec courage et résignation aux difficultés du moment, c’est ainsi qu’on a parlé du rôle actif de Marie-José pour défendre directement et indirectement auprès du Führer les intérêts de son frère le roi Léopold après la capitulation belge mais les défaites italiennes ne firent qu’accroître son activité maintenant ouvertement antifasciste. Dès 1942, elle soutenait son mari et son cousin Amédée d’Aoste qui entraient en relations discrètes avec les Anglais et après leur échec, elle reprenait elle-même l’initiative par l’intermédiaire de l’ambassade britannique auprès du Vatican (avec l’aide de l’abbé Montini, le futur pape Paul VI) puis par celui du gouvernement portugais et plus fondamentalement encore avec le maréchal Badoglio lui-même.

Tout cela faillit mal finir en septembre 1943 du fait du revirement politique du roi qui élimina enfin Mussolini du pouvoir provoquant l’entrée des Allemands en Italie pour punir la famille royale de sa « trahison ». Naïf ? surpris ?, inconscient ? négligent ? Victor-Emmanuel,  toujours secret,  « oublia » de prévenir sa fille Mafalda (163) et sa belle-fille Marie-José alors en résidence à Sant’ Anna di Valdieri en Piémont provoquant la capture de la première et la fuite éperdue de la seconde en Suisse ( à Montreux puis sur les rives du lac de Thoune).

Il fallut encore attendre de longs mois pour revenir en Italie (par le Grand Saint Bernard) en avril 1945 dans de pittoresques et pénibles conditions (à pied et à ski avec l’aide de partisans) et retrouver enfin son mari devenu entre temps, en juin 1944, lieutenant-général du royaume mais qui dut attendre mai 1946 pour monter sur le trône auquel son père ne voulait obstinément pas renoncer. Cependant il était politiquement trop tard et le malheureux nouveau jeune roi ne put en quelques semaines redresser la situation d'autant que sa femme ne semble pas l'avoir beaucoup aidé, vengeance vis à vis d'un pays, d'une famille et d’un époux qui l'avaient si peu respectée (elle ne revit jamais ses beaux parents), réalisme et résignation devant une situation jugée inévitable ? On a aussi chuchoté à propos d’une ambition secrète ou cachée de devenir elle-même régente pour sauver la monarchie . En tous les cas, le courant royaliste fut battu lors du référendum de juin 1946 même si ce dernier ne semble pas s'être déroulé dans les meilleures conditions de démocratie et de justice.

Durant encore près d'un demi siècle, il fallut supporter l'exil (au Portugal mais surtout à Genève et plus précisément à Merlinge), les accidents de santé et les difficultés familiales avec une séparation immédiate de fait avec Humbert. Même si les apparence officielles furent respectées, cette rupture entraîna le « partage » des enfants (la reine conservant la garde de son fils et laissant le roi s’occuper de leurs trois filles). De son côté, la république italienne même si elle ne s'acharna pas contre le souvenir et les biens de la famille royale, n’en interdit pas moins au roi ainsi qu’à son épouse « le droit au retour ».

Elle résista au sort par un intense souci de sa liberté privée et par l'indépendance de son esprit (d’où ses multiples voyages à l’étranger et sa belle activité intellectuelle avec ses travaux sur la Maison de Savoie jusqu’au XVI° siècle (La Maison de Savoie - Les origines-Le Comte Vert-Le Comte Rouge. Paris, 1956/ La Maison de Savoie - Amédée VIII, la jeunesse. La Maison de Savoie - Amédée VIII, le duc qui devint pape, Paris, 1962 - Emanuele Filiberto di Savoia. Un valoroso guerriero, un principe illuminato. 1994.trad. française. Genève. 1995). prouvant combien elle n'était pas pour rien issue par son père de la prestigieuse et remarquable famille des Saxe-Cobourg, mais aussi par sa mère de la dynastie bavaroise des Wittelsbach si riche en originaux, en artistes et en provocateurs. Même chez les princes, on n'échappe pas à ses origines.

Certes, épouse et princesse malheureuse, reine manquée et punie pour des fautes qu’elle n’avait pas commises (et de loin !), elle n’échappa pas non plus aux difficultés de la vieillesse. En 1983 elle perdit presque en même temps son mari et ses deux frères belges (l’ex-roi Léopold et l’ex-prince régent Charles-Théodore). Cependant en 1988, elle put enfin réapparaître publiquement à Turin où elle fut reçue en grande pompe et n'en surprit pas moins ses anciens sujets par sa bonne humeur, son refus de l'étiquette et la vigueur de ses propos "démocratiques". Elle songea un temps s’établir au Mexique près de sa fille Marie-Béatrice, mais malade, fatiguée et déçue elle préféra rester à Genève où elle s’éteignit en janvier 200I, retrouvant le roi Humbert à Hautecombe en Savoie, ex-propriété personnelle des Savoie dans leur province d’origine, mais que ses enfants considèrent encore comme une prolongation de son exil loin de Rome et de Turin. On a dit que ses archives privées déposées à Londres ne pourraient être ouvertes qu’en 2071 : il nous reste donc du temps pour compléter éventuellement cette notice.


  • CAMBRIA A : Maria José. Milan 1966.
  • ARTIERI G: Umberto II e la fine della monarchia Milan, 1983
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  • DE ROLANDO I :: Maria Jose /. - Cavallermaggiore , 1988. - 459 p.
  • PETACCO A-Regina : la vita e i segreti di Maria Jose, -Milan 1997, 277 p.
  • BERTOLDI S : L'ultimo re l'ultima regina / - Milan : 1992. - 270 p
  • SPERONI G: Umberto 2. : il dramma segreto dell'ultimo re .Milan 1992. 369 p.
  • FERRARA G: Il tempo di Marie-José. Milan 1993.
  • INCISA DI CAMERANAL.: L’italia della luogotenenza. Milan, 1996
  • REGOLO L: La regina incompresa : tutto il racconto della vita di Maria Jose di Savoia -– Milan 1997 et 2002 - 454 p.
  • STRANIERO M : Maria José, l’ultima regina d’Itaiia Bergame. 2001 211p.
  • SPINOSA A. Maria Jose e i Savoia : due inconciliabili visioni / Florence : [2001]. - 63 p. ((All. a Storia e dossier, n. 159-
  • MARIE-JOSE de Savoie ; Giovinezza di una regina; ( trad. Atzeni Sergio). - Milan : 2001. - 346 p.,
  • BERTODI S : Umberto e Maria Jose di Savoia – Milan, 2002. - 256 p.
  • ARTIERI G, Umberto 2. il re gentiluomo : colloqui sulla fine della monarchia, Florence, , 2002. , 280 p.
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